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Comment Internet a facilité l'organisation des révolutions sociales mais en a compromis la victoire

  • 0:00 - 0:04
    Il est vrai qu'on entend
    de plus en plus parler
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    du rôle des médias sociaux
    dans les manifestations.
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    Mais après une dizaine d'années
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    d'études et de participation à
    de nombreux mouvements sociaux,
  • 0:13 - 0:14
    j'ai enfin réalisé
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    que, même si la technologie donne
    du pouvoir aux mouvements sociaux,
  • 0:18 - 0:21
    elle peut aussi paradoxalement
    les fragiliser.
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    Ce n'est pas inévitable,
    mais surmonter cet obstacle implique
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    qu'on se demande sérieusement ce qui
    créerait un succès à long terme.
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    Les leçons qu'on en tire s'appliquent
    à de nombreux domaines.
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    Prenez la Turquie par exemple et les
    manifestations de Gezi en juillet 2013.
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    Je suis retournée sur le terrain
    pour en faire l'étude.
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    Twitter a été vital à l'organisation.
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    C'était omniprésent dans le parc,
    avec beaucoup de gaz lacrymogène.
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    Il ne s'agissait pas
    uniquement de technologies.
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    Mais le peuple turc s'était déjà
    habitué au pouvoir de Twitter
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    à cause d'un incident
    survenu l'année précédente
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    quand des avions militaires avaient
    lâché des bombes et tué
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    34 contrebandiers kurdes
    près de la frontière.
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    Les médias turcs avaient alors
    entièrement censuré cette nouvelle.
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    En salle de rédaction,
    les éditeurs attendaient
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    que le gouvernement leur dise quoi faire.
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    Un journaliste qui en avait eu assez
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    a pris un billet d'avion à ses frais
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    et s'est rendu au village
    où ça c'était passé.
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    Il a été confronté à cette scène :
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    un défilé de cercueils descendant
    une colline, les familles en pleurs.
  • 1:26 - 1:28
    Il m'a dit après combien
    il avait été bouleversé,
  • 1:28 - 1:30
    et ne sachant quoi faire,
  • 1:30 - 1:32
    il a sorti son téléphone,
  • 1:32 - 1:34
    comme n'importe qui aurait pu le faire.
  • 1:34 - 1:38
    Il a pris cette photo et l'a twittée.
  • 1:38 - 1:41
    Et voilà, elle est devenue virale.
  • 1:41 - 1:45
    Elle a brisé la censure et a forcé
    les médias à couvrir l'événement.
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    Donc, quand un an plus tard,
    il y a eu la manifestation de Gezi,
  • 1:48 - 1:51
    tout a commencé parce que
    le parc allait être rasé,
  • 1:51 - 1:54
    et c'est ensuite devenu
    une manifestation contre l'autorité --
  • 1:54 - 1:58
    ça n'a pas été surprenant qu'elle
    soit aussi censurée par les médias,
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    mais par moments
    c'était quand même ridicule.
  • 2:01 - 2:03
    Quand les choses étaient si intenses,
  • 2:03 - 2:07
    que CNN International couvrait
    en directe d'Istanbul,
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    CNN Turquie passait au même moment
    un documentaire sur les pingouins.
  • 2:13 - 2:16
    C'est vrai que j'aime ce type de
    les documentaires,
  • 2:16 - 2:18
    mais il y avait plus important ce jour-là.
  • 2:18 - 2:22
    Un téléspectateur en colère a mis ses
    écrans côte à côte et pris cette photo.
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    Celle-ci aussi est devenue virale.
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    Et depuis, on appelle les médias turcs
    « les médias pingouins ». (Rires)
  • 2:28 - 2:31
    Mais cette fois-ci les gens
    ont su réagir :
  • 2:31 - 2:33
    ils ont sorti leur téléphone
  • 2:33 - 2:35
    et ont cherché les vraies informations.
  • 2:35 - 2:38
    Mieux encore, ils sont allés au parc,
    ont participé, pris des photos,
  • 2:38 - 2:40
    et les ont mises sur les médias sociaux.
  • 2:40 - 2:45
    La connectivité numérique a servi à tout.
    De la nourriture aux dons...
  • 2:47 - 2:52
    Tout a été partiellement organisé
    à travers ces technologies.
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    Utiliser internet pour mobiliser des gens
    et faire connaître ces manifestations
  • 2:56 - 2:59
    n'est pas nouveau.
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    Souvenez vous des Zapatistes
  • 3:00 - 3:05
    et du soulèvement des paysans au Chiapas,
  • 3:05 - 3:11
    menés par le charismatique sous-commandant
    Marcos, masqué, avec sa pipe.
  • 3:11 - 3:13
    Ça a été le premier mouvement
  • 3:13 - 3:16
    à recevoir une attention
    mondiale grâce à internet.
  • 3:16 - 3:18
    Ou prenez Seattle, en 99,
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    quand un effort populaire multinational
    a attiré l'attention globale
  • 3:22 - 3:27
    sur l'Organisation Mondiale du Commerce,
    une organisation alors méconnue,
  • 3:27 - 3:31
    en utilisant ces technologies
    numériques pour les aider à s'organiser.
  • 3:31 - 3:34
    Et de plus en plus, tous ces mouvements
  • 3:34 - 3:37
    secouent des pays entiers :
  • 3:37 - 3:42
    les révoltes arabes du Bahrain
    à la Tunisie, l'Égypte, etc ;
  • 3:42 - 3:47
    les Indignés en Espagne,
    en Italie, en Grèce, Gezi ;
  • 3:47 - 3:51
    Taïwan, l'Euromaidan en Ukraine,
    Hong Kong...
  • 3:51 - 3:56
    Pensez aux initiatives plus récentes
    comme le hashtag #BringBackOurGirls.
  • 3:56 - 4:03
    Aujourd'hui des tweets peuvent
    déclencher une campagne mondiale.
  • 4:03 - 4:06
    Une page Facebook peut devenir
    le noyau d'une mobilisation massive.
  • 4:06 - 4:08
    Incroyable.
  • 4:08 - 4:13
    Mais pensez aux moments dont
    je viens de vous parler.
  • 4:13 - 4:17
    Leurs conséquences réelles
    et leurs accomplissements
  • 4:17 - 4:22
    ne sont pas vraiment proportionnels
    à l'ampleur qu'ils ont générée en ligne.
  • 4:22 - 4:26
    Les espoirs qu'ils ont nourris
    ne sont pas vraiment égalés
  • 4:26 - 4:31
    par le résultat final.
  • 4:31 - 4:33
    Et ça soulève une question :
  • 4:35 - 4:38
    alors que la technologie numérique
    facilite les mouvements sociaux,
  • 4:38 - 4:42
    pourquoi est-ce que des résultats
    plus positifs ne sont pas plus probables ?
  • 4:42 - 4:48
    En incluant les plateformes numériques
    dans l'activisme et la politique,
  • 4:48 - 4:52
    ignorons-nous certains des avantages
    à choisir le chemin le plus long ?
  • 4:52 - 4:53
    Je crois que oui.
  • 4:53 - 4:55
    Je crois que la règle d'or est
  • 4:55 - 5:01
    qu'on ne tire pas nécessairement plus
    de profits d'une mobilisation plus facile.
  • 5:01 - 5:04
    Pour être plus claire,
    il est vrai que la technologie
  • 5:04 - 5:06
    nous donne du pouvoir
    de bien des manières.
  • 5:06 - 5:08
    Elle est très puissante.
  • 5:08 - 5:12
    En Turquie, j'ai vu
    quatre jeunes étudiants
  • 5:12 - 5:16
    organiser un réseau national de
    citoyens-journalistes appelé 140 Journos
  • 5:16 - 5:20
    qui est devenu le centre des informations
    non-censurées dans le pays.
  • 5:20 - 5:26
    En Égypte, j'ai vu un autre petit groupe
    utiliser cette connectivité numérique
  • 5:26 - 5:30
    pour organiser l'approvisionnement et
    la logistique de 10 hôpitaux de campagne,
  • 5:30 - 5:32
    de très grosses installations,
  • 5:32 - 5:37
    pendant les confrontations
    près de la place Tahrir en 2011.
  • 5:37 - 5:41
    J'ai demandé à Tahrir Supplies,
    le fondateur de l'effort,
  • 5:41 - 5:46
    en combien de temps
    l'idée s'était concrétisée.
  • 5:47 - 5:50
    « Cinq minutes ». Il m'a dit cinq minutes.
  • 5:50 - 5:52
    Sans formation,
    ni expérience en logistique.
  • 5:52 - 5:56
    Ou encore, pensez au mouvement Occupy
    qui a bouleversé le monde en 2011.
  • 5:56 - 6:00
    Tout est parti d'un e-mail
    du magazine Adbusters,
  • 6:00 - 6:03
    envoyé à 90 000 de ses abonnés.
  • 6:03 - 6:07
    Deux mois après ce premier e-mail,
  • 6:07 - 6:13
    il y a eu 600 occupations
    et manifestations aux États-Unis.
  • 6:13 - 6:18
    Moins d'un mois après la première
    occupation, dans le parc Zuccotti,
  • 6:18 - 6:25
    une manifestation mondiale s'est tenue
    dans 950 villes dans 82 pays.
  • 6:25 - 6:28
    C'était une des manifestations
    les plus grandes jamais organisées.
  • 6:28 - 6:34
    Maintenant considérez le mouvement
    des droits civils en Alabama en 1955
  • 6:34 - 6:41
    qui luttait contre la ségrégation raciale
    dans les bus qu'ils voulaient boycotter.
  • 6:41 - 6:42
    Ils se sont préparés longtemps
  • 6:42 - 6:46
    et ont décidé d'agir
    après l'arrestation de Rosa Parks.
  • 6:47 - 6:51
    Mais comment ont-ils fait passer le mot ?
    « Demain on commence le boycott ».
  • 6:51 - 6:56
    Comment ont-ils fait ça sans SMS,
    sans Facebook ou Twitter ?
  • 6:56 - 7:01
    Ils ont utilisé un miméo
    pour imprimer 52 000 tracts
  • 7:01 - 7:04
    en se faufilant dans les salles
    de reprographie des universités
  • 7:04 - 7:07
    et en travaillant toute la nuit
    en cachette.
  • 7:07 - 7:10
    Ensuite ils ont utilisé les 68
    organisations afro-américaines
  • 7:10 - 7:14
    qui quadrillaient la ville
    pour en faire la distribution à la main.
  • 7:14 - 7:19
    Les tâches logistiques étaient imposantes,
    il s'agissait ici de gens pauvres
  • 7:19 - 7:21
    qui devaient tout de même
    se rendre au travail.
  • 7:21 - 7:24
    Ils ont donc organisé
    un système de co-voiturage,
  • 7:24 - 7:26
    encore une fois, en se rencontrant.
  • 7:26 - 7:29
    Sans SMS, sans Twitter, sans Facebook.
  • 7:29 - 7:32
    Ils ont dû se rencontrer souvent
    pour maintenir le co-voiturage.
  • 7:32 - 7:35
    Aujourd'hui ça semblerait plus facile.
  • 7:35 - 7:40
    On pourrait créer une base de données
    avec les trajets disponibles et demandés.
  • 7:40 - 7:43
    Cette base de données pourrait
    tout coordonner et envoyer des SMS.
  • 7:43 - 7:46
    On n'aurait pas besoin
    de se rencontrer autant.
  • 7:46 - 7:48
    Mais encore une fois,
    regardez par exemple
  • 7:48 - 7:51
    le mouvement des droits civiques
    aux États-Unis
  • 7:51 - 7:55
    a avancé sur un terrain miné
    de dangers politiques.
  • 7:55 - 8:00
    Il a fait face à la répression et remporté
    des concessions politiques majeures.
  • 8:00 - 8:04
    Le mouvement a navigué et innové
    en prenant des risques.
  • 8:04 - 8:07
    En comparaison, trois ans après Occupy,
  • 8:07 - 8:10
    la conversation mondiale
    à propos des inégalités,
  • 8:10 - 8:14
    et les politiques qui l'ont sucité
    sont toujours en place.
  • 8:14 - 8:17
    L'Europe a aussi été secouée par des
    manifestations anti-austérité
  • 8:17 - 8:21
    mais le continent
    n'a pas changé de direction.
  • 8:21 - 8:24
    En adhérant à ces technologies,
  • 8:24 - 8:31
    passons-nous à côté des avantages
    de ce qui est plus lent et durable ?
  • 8:31 - 8:32
    Pour bien comprendre,
  • 8:32 - 8:36
    je suis retournée en Turquie
    un an après les manifestations
  • 8:36 - 8:38
    et j'ai interviewé
    différentes personnes :
  • 8:38 - 8:42
    des activistes, des politiciens,
  • 8:42 - 8:46
    des dirigeants et leur opposition.
  • 8:46 - 8:49
    J'ai trouvé que les manifestants de Gezi
    étaient désespérés.
  • 8:49 - 8:52
    Ils étaient frustrés
  • 8:52 - 8:55
    et ils avaient accompli bien moins
    que ce qu'ils voulaient.
  • 8:55 - 8:57
    Cela m'a rappelé ce que
    j'avais entendu ailleurs
  • 8:57 - 9:01
    de beaucoup d'autres manifestants
    avec qui je suis en contact.
  • 9:01 - 9:03
    J'ai réalisé qu'une partie du problème
  • 9:03 - 9:09
    est qu'aujourd'hui une manifestation,
    c'est un peu comme faire l'Everest
  • 9:09 - 9:12
    avec l'aide de 60 Sherpas.
  • 9:12 - 9:15
    Et internet est comme notre Sherpa.
  • 9:15 - 9:19
    On prend la route la plus rapide
  • 9:19 - 9:22
    et on ne remplace pas les avantages
    d'un travail plus lent.
  • 9:22 - 9:24
    Parce que vous savez,
  • 9:24 - 9:27
    ce travail organisationnel,
  • 9:27 - 9:30
    toute cette logistique
    méticuleuse et intimidante,
  • 9:30 - 9:32
    n'a pas servi qu'à l'organisation
    en elle-même.
  • 9:32 - 9:37
    Il a aussi créé le genre d'organisation
    qui pouvait penser ensemble
  • 9:37 - 9:39
    et prendre des décisions
    difficiles ensemble,
  • 9:39 - 9:43
    créer un consensus et innover,
    mais surtout,
  • 9:43 - 9:47
    continuer d'avancer ensemble
    malgré les différences.
  • 9:47 - 9:51
    Donc quand vous voyez ça
    à Washington en 1963,
  • 9:51 - 9:53
    en regardant cette photo...
  • 9:53 - 9:56
    c'est la marche où Martin Luther King
    a donné son fameux discours
  • 9:56 - 9:59
    « I have a dream », en 1963.
  • 9:59 - 10:01
    On n'y voit pas juste une manifestation,
  • 10:01 - 10:04
    on n'y entend pas seulement
    un puissant discours,
  • 10:04 - 10:09
    on y voit aussi le travail consciencieux
    à long terme qu'elle peut exprimer.
  • 10:09 - 10:11
    Et si vous êtes au pouvoir,
  • 10:11 - 10:15
    vous réalisez alors qu'il faut mesurer
    la capacité qu'implique cette marche.
  • 10:15 - 10:21
    Pas juste la marche, mais la capacité
    qu'elle représente. Sérieusement.
  • 10:21 - 10:23
    Contrairement aux marches de Occupy
  • 10:23 - 10:26
    qui ont été organisées
    en deux semaines,
  • 10:26 - 10:28
    on voit du mécontentement
  • 10:28 - 10:32
    mais on y voit pas vraiment de dents
    qui peuvent mordre sur le long terme.
  • 10:32 - 10:36
    Le mouvement civil, lui,
    a innové tactiquement :
  • 10:36 - 10:42
    du boycott, aux sièges, aux piquets,
    aux marches et aux Freedom Rides.
  • 10:42 - 10:46
    Les mouvements d'aujourd'hui se fondent
    rapidement, sans la base organisationnelle
  • 10:46 - 10:49
    qui pourra les aider
    à surmonter les obstacles.
  • 10:49 - 10:53
    Ils se sentent un peu comme des start-ups
    qui ont grandi d'un coup
  • 10:53 - 10:55
    sans savoir quoi faire par la suite.
  • 10:55 - 10:57
    Ils réussissent peu souvent à
    changer de tactique
  • 10:57 - 11:00
    parce qu'ils n'ont pas la
    profondeur de capacité
  • 11:00 - 11:03
    pour croître à travers ces transitions.
  • 11:03 - 11:08
    Je veux être claire :
    le miméo n'était pas magique.
  • 11:08 - 11:13
    C'était la capacité à travailler ensemble,
    penser ensemble collectivement.
  • 11:13 - 11:17
    Tout ça n'a pu se faire qu'avec
    du temps et beaucoup de travail.
  • 11:17 - 11:19
    Pour comprendre tout ça,
  • 11:19 - 11:23
    j'ai interviewé un des principaux
    responsables du parti dirigeant turc.
  • 11:23 - 11:25
    Je lui ai demandé :
    « Comment faites-vous ? »
  • 11:25 - 11:28
    Eux aussi se servent beaucoup
    des technologies numériques.
  • 11:28 - 11:30
    Donc quel est le secret ?
  • 11:30 - 11:32
    Eh bien, il me l'a dit.
  • 11:32 - 11:39
    Il m'a dit que le secret est qu'il ne
    prend jamais de sucre avec son thé.
  • 11:39 - 11:42
    Je lui ai demandé :
    « C'est quoi, le rapport ? »
  • 11:42 - 11:45
    Il m'a dit que son parti prépare
    les prochaines éléctions
  • 11:45 - 11:47
    juste après la dernière
  • 11:47 - 11:50
    et qu'il passe son temps à rencontrer
    les électeurs chez eux,
  • 11:50 - 11:53
    à leur cérémonie de mariage,
    de circoncision,
  • 11:53 - 11:56
    puis il rencontre ses collègues
    pour comparer leurs notes.
  • 11:56 - 12:00
    Avec autant de rencontres tous les jours
    et du thé offert à chaque fois,
  • 12:00 - 12:04
    -- comme il serait impoli
    de refuser --
  • 12:04 - 12:08
    il ne pouvait même pas prendre
    un sucre avec son thé.
  • 12:08 - 12:12
    Parce que ça ferait bien trop de sucre,
    il ne pouvait calculer combien de kilos...
  • 12:12 - 12:16
    A ce moment j'ai compris
    pourquoi il parlait si vite.
  • 12:16 - 12:21
    On s'était rencontré en après-midi et il
    avait déjà eu une bonne dose de caféine.
  • 12:21 - 12:25
    Mais son parti a largement remporté
    deux élections majeures
  • 12:25 - 12:29
    dans l'année qui a suivi
    les manifestations de Gezi.
  • 12:29 - 12:32
    Oui, les gouvernements ont
    différentes ressources à apporter
  • 12:32 - 12:35
    ce n'est donc pas pareil,
    mais les différences sont instructives.
  • 12:35 - 12:39
    Comme pour toutes ces histoires,
    il ne s'agit pas juste de technologie,
  • 12:39 - 12:44
    mais bien de ce qu'elle nous aide
    à accomplir et réaliser.
  • 12:44 - 12:48
    Les mouvements sociaux d'aujourd'hui
    veulent opérer de manière informelle.
  • 12:48 - 12:50
    ils ne veulent pas
    d'encadrement institutionel.
  • 12:50 - 12:55
    Ils ne veulent pas se mêler de politique
    par peur de corruption et cooptation.
  • 12:55 - 12:57
    Et ils n'ont pas tort.
  • 12:57 - 13:00
    De puissants intérêts font taire
    les agents de la démocratie moderne
  • 13:00 - 13:02
    dans de nombreux pays.
  • 13:02 - 13:06
    Mais de cette manière
    il leur est difficile
  • 13:06 - 13:09
    de durer dans le temps
    et d'influencer le système,
  • 13:09 - 13:13
    ce qui cause l'amenuisement
    des protestataires,
  • 13:13 - 13:16
    et encore plus de corruption en politique.
  • 13:16 - 13:21
    La politique et la démocratie sont
    bancales sans un recours efficace,
  • 13:21 - 13:27
    parce que les causes qui ont inspiré
    les mouvements modernes sont cruciales.
  • 13:27 - 13:30
    Le réchauffement climatique nous guette.
  • 13:30 - 13:35
    Les inégalités étouffent la croissance
    humaine, notre potentiel, l'économie...
  • 13:35 - 13:38
    L'autoritarisme étouffe
    de nombreux pays.
  • 13:38 - 13:40
    Il faut que ces mouvements
    soient plus efficaces.
  • 13:40 - 13:43
    Certains avancent que
    que le problème
  • 13:43 - 13:49
    est qu'on ne prend pas autant
    de risques qu'avant.
  • 13:49 - 13:52
    Et ce n'est simplement pas vrai.
  • 13:52 - 13:54
    A Gezi, à Tahrir et ailleurs,
  • 13:54 - 13:58
    j'ai vu des gens mettre
    leur vie en danger.
  • 13:58 - 14:01
    Malcolm Gladwell a tort de dire
    que les manifestants d'aujourd'hui
  • 14:01 - 14:03
    ont des liens virtuels moins solides.
  • 14:03 - 14:07
    Non, ils viennent à ces manifestations,
    tout comme avant,
  • 14:07 - 14:10
    avec leurs amis, leur réseau,
  • 14:10 - 14:13
    et parfois ils forment
    de nouvelles amitiés à vie.
  • 14:13 - 14:14
    Je revois encore les amis
  • 14:14 - 14:18
    que je me suis faits lors des
    manifestations zapatistes il y a dix ans.
  • 14:18 - 14:21
    Et les liens entre inconnus
    ne sont pas sans valeur.
  • 14:21 - 14:25
    Quand j'ai reçu du gaz lacrymogène
    à Gezi, des inconnus m'ont aidée.
  • 14:25 - 14:28
    Tout le monde s'entraidait
    au lieu de s'enfuir.
  • 14:28 - 14:31
    À Tahrir, j'ai vu des gens,
    des protestataires,
  • 14:31 - 14:35
    travailler vraiment dur pour
    se protéger les uns les autres.
  • 14:35 - 14:37
    Et sensibiliser
    au numérique est génial
  • 14:37 - 14:40
    parce qu'on change la politique
    en changeant les perceptions.
  • 14:40 - 14:43
    Mais les mouvements contemporains
  • 14:43 - 14:47
    doivent rapidement passer outre
    le taux de participation,
  • 14:47 - 14:51
    et trouver un moyen de penser ensemble
    comme une collectivité,
  • 14:51 - 14:54
    de développer de fortes propositions
    politiques, créer un consensus,
  • 14:54 - 14:58
    de déterminer les étapes politiques,
    et de les comprendre pour avoir du poids,
  • 14:58 - 15:02
    parce que toutes ces bonnes intentions,
    ce courage et ces sacrifices
  • 15:02 - 15:03
    ne seront pas assez.
  • 15:03 - 15:05
    Il y a beaucoup d'efforts.
  • 15:05 - 15:10
    En Nouvelle-Zélande, un groupe de jeunes
    développe une plateforme appelée Loomio
  • 15:10 - 15:13
    pour la prise de décision
    participative à une certaine échelle.
  • 15:13 - 15:16
    En Turquie, 140 Journos
    conduisent un hackathon
  • 15:16 - 15:20
    pour apporter du soutien aux communautés
    et au journalisme citoyen.
  • 15:20 - 15:24
    En Argentine, une plateforme open-source
    du nom de DemocracyOS
  • 15:24 - 15:27
    encourage la participation
    au parlement et aux partis politiques.
  • 15:27 - 15:31
    Tout ceci est génial et
    il nous en faut plus.
  • 15:31 - 15:35
    Mais il nous faut plus qu'un meilleur
    processus décisionnel en ligne.
  • 15:35 - 15:40
    Pour actualiser la démocratie,
    il nous faudra innover à tous les niveaux.
  • 15:40 - 15:45
    De l'organisationnel
    au politique, au social.
  • 15:45 - 15:49
    Car pour obtenir un succès à long terme,
  • 15:49 - 15:51
    parfois, il est bon de prendre
    du thé sans sucre,
  • 15:51 - 15:53
    pour accompagner nos Tweets.
  • 15:53 - 15:54
    Merci.
  • 15:54 - 15:56
    (Applaudissements)
Title:
Comment Internet a facilité l'organisation des révolutions sociales mais en a compromis la victoire
Speaker:
Zeynep Tufekci
Description:

Aujourd'hui la vitesse à laquelle on répand l'information est telle qu'un e-mail peut engendrer une campagne mondiale de sensibilisation, comme le mouvement Occupy. En tant que techno-sociologue, Zeynep Tufekci cherche à montrer que la simplicité des médias sociaux peut aussi nuire au changement social à long terme. De Gezi au Printemps Arabe, de l'Ukraine à Hong Kong, elle nous montre comment les mouvements contemporains pourraient bénéficier des avantages à faire les choses de manière plus difficile (et aussi plus lente).

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Video Language:
English
Team:
closed TED
Project:
TEDTalks
Duration:
16:14

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