S'entendre dans un monde à voix multiples | Stéphane de Freitas | TEDxChampsElyseesSalon
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0:13 - 0:15Bonjour à tous.
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0:15 - 0:16Ça va ?
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0:16 - 0:20Ouah ! Ne vous inquiétez pas,
ça va être rapide. -
0:20 - 0:22(Rires)
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0:25 - 0:27Le 27 octobre 2005,
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0:28 - 0:33deux jeunes adolescents, Zyed et Bouna,
meurent électrocutés dans un poste EDF -
0:33 - 0:35en tentant d'échapper
à un contrôle de police. -
0:37 - 0:40Du coup, des jeunes de Clichy-sous-Bois
se soulèvent contre la police, -
0:40 - 0:42qui rétorque quelques jours plus tard
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0:42 - 0:44en envoyant une bombe lacrymogène
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0:44 - 0:46au pied d'une mosquée
en plein mois de ramadan. -
0:46 - 0:49S'ensuivent des émeutes
dans les quartiers, -
0:49 - 0:51d'abord dans le 9-3,
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0:51 - 0:53puis dans tous les quartiers de France.
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0:55 - 0:57J'avais à l'époque 19 ans,
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0:57 - 0:59et j'ai grandi en Seine-Saint-Denis
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0:59 - 1:00ainsi que toute ma famille,
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1:00 - 1:03une partie de mon enfance
et de mon adolescence. -
1:03 - 1:06Je me suis senti très concerné
par ce qui se passait -
1:06 - 1:08parce que comme une bonne partie
de ces jeunes -
1:08 - 1:10qui eux s'exprimaient par la violence,
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1:10 - 1:13j'étais moi-même issu de l'immigration
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1:13 - 1:17et je pouvais ressentir le malaise
qu'ils avaient vis à vis du système -
1:17 - 1:19ou de la France.
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1:19 - 1:22Ce qui m'a vraiment frappé à ce moment-là,
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1:22 - 1:25c'est le traitement
des médias à double tranchant. -
1:25 - 1:28D'un côté, le gamin que j'étais me disait,
tout le monde en parle. -
1:28 - 1:31Les pouvoirs publics ne vont pas
pouvoir ignorer la difficulté -
1:31 - 1:33qu'il y a en France, l'harmonie,
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1:33 - 1:37la problématique qu'on a à unifier
des Français qui sont divers -
1:37 - 1:39et notamment dans certains quartiers,
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1:39 - 1:41ces problématiques qui se sont accumulées
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1:41 - 1:43depuis des dizaines d'années
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1:43 - 1:47et que l’État n'arrive pas
et n'arrive toujours pas à endiguer. -
1:48 - 1:52De l'autre, en fait, c'était cette peur
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1:52 - 1:55en voyant semaine après semaine,
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1:55 - 1:58se poser une caricature
de cette fracture sociale -
1:58 - 2:01qui s'imposait comme une chape
de plomb sur la société, -
2:01 - 2:03ce dialogue de société
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2:03 - 2:05qui était dû notamment
au langage approximatif -
2:05 - 2:07d'abord employé par les médias
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2:07 - 2:10puis qui se répandait au niveau des gens
dans leur dialogue au quotidien. -
2:10 - 2:13On entendait parler de guerre civile.
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2:13 - 2:16Le terme improprement employé
était celui-là qui était répandu. -
2:16 - 2:22On entendait parler que la France
était à feu et à sang. -
2:22 - 2:24Pourtant, les quartiers concernés,
si on les additionne, -
2:24 - 2:29ne représenteraient
qu'à peine 0,01% du territoire. -
2:30 - 2:33On a même parlé à un moment
de révolte musulmane. -
2:33 - 2:37Bref, les approximations de langage
en fait qui composaient, qui polluaient -
2:37 - 2:39et qui perturbent le dialogue de société,
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2:39 - 2:42se retrouvaient au niveau
des gens et a fortiori, -
2:42 - 2:46dans une société diverse,
créaient une complexité. -
2:46 - 2:49J'ai vu au fil des semaines,
se poser -
2:49 - 2:51une rhétorique implicite
du « eux » contre « nous » -
2:51 - 2:53avec deux camps.
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2:53 - 3:01D'un côté, plutôt une population
qui serait blanche, conservatrice, -
3:01 - 3:02au moins, voire raciste,
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3:02 - 3:06et qui aurait un intérêt à entretenir
des plafonds de verre -
3:06 - 3:10et le système discriminatoire
l'arrangerait, donc le maintenir. -
3:12 - 3:13De l'autre côté,
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3:14 - 3:16une population immigrée
-
3:17 - 3:22qui serait soit fainéante
et/ou génétiquement violente -
3:23 - 3:28et qui bien entendu soit porte le voile,
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3:28 - 3:30la capuche et --
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3:30 - 3:32mesdames et messieurs bien sûr --
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3:35 - 3:37la fameuse
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3:37 - 3:38casquette
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3:38 - 3:39à l'envers.
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3:48 - 3:51Le dialogue de société,
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3:51 - 3:52perturbé
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3:52 - 3:54comme il l'était à ce moment-là,
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3:55 - 3:56était non seulement offensant,
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3:56 - 3:59offensant pour les uns
comme pour les autres. -
3:59 - 4:03D'autant plus que nous devons
faire face à deux défis. -
4:04 - 4:07Le premier, c'est celui de la diversité.
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4:07 - 4:10Nos sociétés sont diverses
et vont l'être de plus en plus, -
4:10 - 4:12qu'on le veuille ou non.
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4:12 - 4:13L'explosion des flux migratoires,
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4:13 - 4:15nous-mêmes étudiants en France,
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4:15 - 4:18on a la chance de pouvoir partir
facilement en Erasmus à l'étranger, -
4:18 - 4:21et pourquoi pas ? s'expatrier, y vivre.
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4:21 - 4:23De même, on peut venir
chez nous plus facilement -
4:23 - 4:27mais cet enjeu n'est pas seulement
l'enjeu qui se passe en France, -
4:27 - 4:29c'est l'enjeu
pour toutes les sociétés du monde -
4:29 - 4:32et c'est un mouvement
avec lequel il va falloir dealer. -
4:35 - 4:38Le second événement historique
auquel nous assistons -- -
4:38 - 4:40je ne veux pas parler
du 4e titre consécutif -
4:40 - 4:43que le PSG va remporter cette année...
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4:44 - 4:45Zlatan, si tu nous entends,
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4:46 - 4:48paix à ton âme, plutôt.
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4:50 - 4:52Je veux parler bien entendu
de la crise d'Internet. -
4:55 - 4:58Les remaniements qui sont dus
à l'essor et à l'explosion du numérique, -
4:58 - 4:59de l'ère du réseau,
-
4:59 - 5:02où chaque domaine de la société
est frappé et remis en question -
5:02 - 5:05par les valeurs collaboratives,
participatives, -
5:05 - 5:08qui bien sûr ouvrent un champ
des possibles incroyable -
5:08 - 5:11mais aussi ouvrent une ère de doute
et de remise en question. -
5:11 - 5:15Il était beaucoup plus facile
pour le Général de Gaulle -
5:15 - 5:17posé devant l'ORTF à 20h,
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5:17 - 5:21pendant que les Français buvaient leur
soupe de nous raconter le récit national -
5:21 - 5:23et de nous raconter
la grandeur de la France -
5:23 - 5:25et de créer quelque part du lien social.
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5:25 - 5:31Aujourd'hui nous sommes potentiellement
7,5 milliards chaînes d'information -
5:31 - 5:34capables d'émettre de l'information
et d'en recevoir. -
5:35 - 5:38On est passé en somme
d'une société à voix dominante -
5:38 - 5:43à une société à voix multiples
où tous peuvent s'exprimer. -
5:43 - 5:47L'agora 2.0 pour ne pas dire l'agora 3.0,
en réalité, -
5:47 - 5:49est une agora où
on n'est plus réellement représenté -
5:49 - 5:53par une petite partie de personnes
qui parlent au nom de tout le monde -
5:53 - 5:55mais bien de 7,5 milliards
de personnes potentielles -
5:55 - 5:58qui ont leur avis, leurs idées,
leur créativité, leurs notions -
5:58 - 6:01mais aussi leurs violences,
leur ras-le-bol. -
6:02 - 6:05Aujourd'hui,
tout ça est un phénomène nouveau. -
6:07 - 6:12On est aussi dans cette génération
face à cet essor des personnes -
6:12 - 6:15qui peuvent s'exprimer
dans une culture du clash. -
6:15 - 6:18La parole est devenue
assimilée au conflit. -
6:19 - 6:23C'est l'ère des trolleurs,
des haters, de la provoc, -
6:23 - 6:26pour faire des vues, des likes,
attirer sur sa page. -
6:26 - 6:28C'est même devenu une stratégie politique,
-
6:28 - 6:32une stratégie un peu offensive,
de poser des punchlines. -
6:32 - 6:34C'est devenu le code.
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6:34 - 6:38La parole est devenue un sport
presque de combat, -
6:38 - 6:41obligée dans le temps court
pour attirer les gens -
6:41 - 6:42par peur, pour attirer la peur.
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6:42 - 6:46C'est le sensationnel qui nous permet
de nous faire entendre. -
6:46 - 6:48En réalité, c'est même une stratégie.
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6:48 - 6:50C'est comme ça que les émissions
de télé sont faites. -
6:52 - 6:55On cultive cette culture du sensationnel
-
6:55 - 6:57et qui est en train,
dans l'inconscient collectif, -
6:57 - 7:01de structurer la parole
à un sport de combat. -
7:02 - 7:03En réalité,
-
7:05 - 7:09tout le monde peut prendre la parole,
mais on ne s'écoute plus vraiment. -
7:09 - 7:11Dans ce brouhaha,
je me suis posé la question ; -
7:11 - 7:13à un moment donné, je me suis dit :
-
7:13 - 7:16« Comment recréer,
dans la société, des espaces -
7:17 - 7:20où la communication,
le dialogue, pourraient se faire -
7:21 - 7:24de manière profonde,
sincère et constructive ? » -
7:26 - 7:31En 2012, je me suis rendu
à l'université de Seine-Saint-Denis -
7:31 - 7:32pour y créer deux choses :
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7:34 - 7:36un concours de prise de parole en public
-
7:36 - 7:38et plus tard, une année après,
-
7:38 - 7:40une formation
à la prise de parole en public. -
7:41 - 7:44Ce concours,
ces programmes dits « Eloquentia » -
7:45 - 7:48consistaient en deux temps.
-
7:48 - 7:52Le premier : un concours ouvert
à tous les jeunes de Seine-Saint-Denis -
7:52 - 7:53entre 18 et 30 ans
-
7:53 - 7:54qui peuvent venir
-
7:54 - 7:57et défendre le propos qu'ils souhaitent,
-
7:57 - 7:59que ce soit une idée, leur créativité,
-
7:59 - 8:02s'ils ont envie de tenir une parole
de colère contre la société. -
8:02 - 8:03Tout le monde peut s'exprimer
-
8:03 - 8:07que ce soit en rap, slam, alexandrins,
prose, discours, peu importe -
8:07 - 8:10dès lors que ce que tu viens
nous dire est sincère. -
8:11 - 8:14Très rapidement, des dizaines de jeunes,
-
8:14 - 8:16dès la première année,
ont participé au concours. -
8:16 - 8:19On a eu des amphithéâtres pleins à craquer
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8:19 - 8:21et pourtant on était en plein cœur du 9-3
-
8:21 - 8:25et dans la société on avait déjà
une crispation sur la liberté d'expression -
8:25 - 8:28qui se mettait en place,
en décalage complet avec ce qui se passait -
8:28 - 8:30en plein cœur
de la Seine-Saint-Denis. -
8:32 - 8:36Le deuxième programme était une formation
à la prise de parole en public -
8:36 - 8:39pour travailler sur la confiance en soi
et justement travailler la parole -
8:40 - 8:42avec un collectif, en groupe.
-
8:43 - 8:48Une formation
qui s'articule sur cinq temps : -
8:48 - 8:52le premier, c'est travailler sur la prise
de parole en milieu professionnel. -
8:52 - 8:53On leur demande :
-
8:53 - 8:54« Quel est ton rêve ?
-
8:54 - 8:56Que veux-tu faire ? »
-
8:56 - 8:58On s'adapte sur 60 heures
de semaine en semaine -
8:58 - 9:02à les accompagner, à leur donner les codes
pour pouvoir aller au bout de leur rêve. -
9:02 - 9:05Le second point : structurer la pensée,
structurer le discours. -
9:05 - 9:07C'est la partie
un peu plus aristotélicienne, -
9:07 - 9:08le discours d'Aristote :
-
9:08 - 9:13l’exorde, une intro, l'argumentation,
la réfutation, la péroraison. -
9:13 - 9:14Structurer la pensée.
-
9:15 - 9:16Troisième temps : un rapport.
-
9:16 - 9:19La parole n'est pas uniquement
quelque chose de personnel. -
9:19 - 9:22C'est ce qu'on fait
avec un groupe, avec les autres. -
9:22 - 9:25Comprendre pourquoi est-ce que
là mon cœur, -
9:25 - 9:28juste avant de rentrer,
battait à 2 000 à l'heure ? -
9:28 - 9:31Le comprendre, gérer son stress,
le positionnement de son corps, -
9:31 - 9:34appréhender, en fait, le rapport
aux autres au-delà du simple fait -
9:34 - 9:37de parler et d'interagir avec les autres.
-
9:37 - 9:40Le reste, c'était
de travailler sur la créativité. -
9:40 - 9:44Aller vers des prises de paroles
différentes par le slam, la poésie, -
9:44 - 9:46le théâtre,
qui permettent l'introspection, -
9:46 - 9:47la remise en question
-
9:47 - 9:50et essayer d'appréhender la parole
sous de nouveaux codes. -
9:53 - 9:54Très rapidement,
-
9:55 - 9:58on a obtenu des résultats dingues
dès la première année. -
9:58 - 10:01Des dizaines de participants.
-
10:01 - 10:05L'événement est devenu un événement
référencé en Seine-Saint-Denis -
10:05 - 10:07où des jeunes pas uniquement
de l'université, -
10:07 - 10:08d'ailleurs jamais de l'université,
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10:08 - 10:11assistaient aux battles.
-
10:11 - 10:14En ce qui concerne la formation,
-
10:14 - 10:16il y avait un phénomène particulier
qui se créait : -
10:16 - 10:18quand les jeunes parlaient,
-
10:18 - 10:22ils venaient, ils s'ouvraient aux autres
mais d'abord à eux-mêmes. -
10:22 - 10:26Dans ce cadre très intime,
en s'ouvrant aux autres, -
10:26 - 10:27il y avait une empathie,
-
10:27 - 10:30un collectif capable
d'aborder tous les sujets -
10:30 - 10:33et de co-construire une réflexion,
pas toujours de changer d'avis, -
10:33 - 10:36mais en tout cas d'évoluer
et de s'enrichir les uns les autres. -
10:40 - 10:42En 2015, pour la deuxième année
de la formation, -
10:42 - 10:46comme on était à contre-courant
avec ce qu'il se passait dans la société, -
10:46 - 10:47j'ai décidé de réaliser un film
-
10:47 - 10:50qui suivrait le plus fidèlement
possible ce qu'il se passait -
10:50 - 10:52au niveau de la formation et du concours.
-
10:52 - 10:54En suivant ces jeunes ordinaires,
-
10:54 - 10:56-- 22 000 jeunes
à l'université de Saint-Denis, -
10:56 - 10:59et 25 000 à côté,
à l'université de Villetaneuse, -
10:59 - 11:0150 000 jeunes
qui ne sont pas tous de banlieue -
11:01 - 11:02mais pour beaucoup
d'entre eux oui, -
11:02 - 11:04qui ont intelligence, créativité,
-
11:04 - 11:06des propos, des militantismes,
-
11:06 - 11:08qui, au demeurant,
dans cette ère collective -
11:08 - 11:10sont indispensables pour refaire société.
-
11:11 - 11:14Mettre la lumière sur eux,
suivre ce qu'il se passait. -
11:14 - 11:16Et à la fois, ils avaient
une dimension extraordinaire -
11:16 - 11:19parce que pendant 60 heures,
ils venaient le samedi -
11:19 - 11:22de 9h30 à 19h30 pour se battre,
pour être accompagnés, -
11:22 - 11:23pour qu'on les accompagne
-
11:23 - 11:26à dire ce qu'ils avaient
à apporter à la société -
11:26 - 11:30et qu'ils aillent au bout de leurs rêves,
professionnels notamment. -
11:33 - 11:37Le premier jour de tournage,
c'était le 7 janvier 2015. -
11:37 - 11:40La première fois qu'on les a filmés,
au même moment, -
11:40 - 11:44la France entamait l'apogée de sa crise
sur la liberté d'expression. -
11:45 - 11:47Les attentats de Charlie Hebdo justement,
-
11:47 - 11:49et les six semaines suivantes,
-
11:49 - 11:51pendant que toute la société se tendait,
-
11:51 - 11:56que le dialogue de société était
vraiment très très compliqué, -
11:56 - 11:59à nouveau une famille se formait,
-
11:59 - 12:03était capable d'aborder tous les sujets
y compris celui de Charlie Hebdo, -
12:03 - 12:07dans une dimension de respect,
d'écoute mutuelle et de co-construction. -
12:08 - 12:10Le film s'appelle « À voix haute ».
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12:10 - 12:12Je vous propose de regarder
un court extrait. -
12:13 - 12:15J'ai dit ce que je pensais.
-
12:15 - 12:18Quand j'ai parlé des cordes arrachées,
je l'ai vraiment pensé -
12:18 - 12:20quand tu l'as dit.
-
12:20 - 12:21Je voyais la scène...
-
12:21 - 12:24- Ça ne m'a pas blessée.
- OK Cool. -
12:24 - 12:26Si ça blesse l'autre,
on ne peut pas rire de tout. -
12:26 - 12:28Il faut s'adapter à la situation inverse
-
12:28 - 12:31Si ça le bloque, ce n'est peut-être
pas un manque de respect -
12:31 - 12:33mais c'est délicat de rire
de ça devant lui. -
12:33 - 12:35Comment tu fais
pour savoir que ça le bloque ? -
12:35 - 12:36Oui c'est ça...
-
12:36 - 12:39En fait, tout le monde
a une sensibilité différente. -
12:39 - 12:43Il faudrait une limite pour
chaque personne, ce n'est pas possible. -
12:43 - 12:45On peut avoir
des sensibilités différentes, -
12:45 - 12:47si on a la culture de l'autodérision.
-
12:47 - 12:48On peut rire de tout en France.
-
12:48 - 12:50Si on s'attaque
à une autre culture, -
12:50 - 12:51il faut faire attention.
-
12:51 - 12:53Si tu dis : « C'est du domaine privé,
-
12:53 - 12:55on n'y touche pas,
-
12:55 - 12:58C'est une autre culture,
on ne peut pas en rigoler. » -
12:58 - 13:00Si on commence comme ça,
on arrête l'humour. -
13:00 - 13:03L'humour, c'est un combat.
La parole, c'est un combat, une arme. -
13:03 - 13:05Je pense et j'ai envie de faire
des blagues -
13:05 - 13:06qui vont dans mon sens.
-
13:06 - 13:07Je sais qu'en face,
-
13:07 - 13:10il y en a qui ne pensent pas comme moi.
-
13:10 - 13:11Dieudonné, je le déteste.
-
13:11 - 13:14Je suis très content
qu'il puisse s'exprimer. -
13:14 - 13:17Je vais utiliser mon humour,
ma parole pour le combattre. -
13:17 - 13:20On a tous des sujets qu'on n'aborde pas,
d'autres qu'on aborde. -
13:20 - 13:23Je n'empêche personne de le faire
mais personnellement, -
13:23 - 13:26je sais que si je vais blesser,
je ne le ferais pas. -
13:26 - 13:28Si j'ai le choix de blesser ou non,
je ne le ferais pas. -
13:28 - 13:30On fait tous les hypocrites.
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13:30 - 13:31C'est pas possible.
-
13:31 - 13:32On va tous rire.
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13:32 - 13:35On le sait très bien,
il y a des choses dont on va rire. -
13:35 - 13:37Mais quand ça nous vise,
on va en pleurer. -
13:37 - 13:41Toute cette histoire, c'est un travail
qu'il faut faire sur nous-mêmes. -
13:41 - 13:42Faut qu'on arrête d'être hypocrite.
-
13:43 - 13:46Personnellement, j'ai dépassé ce stade.
Je peux rire de moi. -
13:46 - 13:47Il n'y a pas de problème.
-
13:47 - 13:49Si mes parents meurent et
qu'on fait une blague, -
13:49 - 13:51si je la trouve drôle,
je vais rire, c'est sadique -
13:51 - 13:52complètement fou,
-
13:52 - 13:54mais moi si ça me fait rire, je ris.
-
13:54 - 13:56Sinon, je ne ris pas.
-
13:56 - 13:57Je ne vais pas faire une polémique.
-
13:57 - 14:00Faut arrêter d'être hypocryte
au bout d'un moment. -
14:00 - 14:01Vivre et laisser vivre.
-
14:01 - 14:03S'il y en a qui veulent en rire,
qu'ils en rient. -
14:12 - 14:13Fraise ?
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14:17 - 14:21(Applaudissements)
-
14:28 - 14:29Merci beaucoup.
-
14:29 - 14:32Le message que j'aimerais
vous faire passer en fait, -
14:32 - 14:34c'est que dans cette crise,
-
14:34 - 14:37dans cette ère à multiples voix
dans laquelle nous vivons, -
14:37 - 14:40on est capable de se parler
et aussi de se comprendre. -
14:41 - 14:46On a obtenu des résultats
qui valent ce qu'ils valent. -
14:46 - 14:48On est depuis 4 ans
à 1 000 étudiants formés. -
14:48 - 14:51Cette année, on va passer
entre 800 et 1 500 jeunes -
14:51 - 14:54qui vont être concernés
par notre programme. -
14:54 - 14:55Le Conseil Général de Seine-Saint-Denis
-
14:55 - 14:58nous laisse travailler sur 50 collèges
-
14:58 - 15:00pour initier les jeunes
à la prise de parole -
15:00 - 15:01et l'importance de la parole citoyenne
-
15:01 - 15:04et de les impliquer dans la vie
de leur établissement. -
15:06 - 15:10Le concours Eloquentia a commencé
à Nanterre, à Grenoble, à Limoges. -
15:10 - 15:14Mais j'ai envie de dire,
on est sur quatre universités, -
15:14 - 15:16il en existe 72 potentiellement.
-
15:16 - 15:18On a travaillé
avec 1 000 jeunes jusqu'ici. -
15:18 - 15:22Il en existe des millions
qui seraient prêts et qui le sont, -
15:22 - 15:24c'est leur montée de terrain.
-
15:24 - 15:25Génération métissée, interconnectée,
-
15:25 - 15:27les Millenials ont ça dans leur ADN.
-
15:27 - 15:30Ils n'attendent que ça, qu'on offre
des cadres éthiques, sains. -
15:30 - 15:33Ça passe bien entendu
par les institutions. -
15:33 - 15:37L'Éducation Nationale s'empare du sujet
-
15:37 - 15:38sur les questions de prise de parole.
-
15:38 - 15:40Mais il faut continuer.
-
15:40 - 15:45C'est d'ailleurs à mon sens,
l'enjeu prioritaire de société, -
15:45 - 15:49avant même d'essayer de nous convaincre
d'être socialiste, d'être libéraux ; -
15:49 - 15:51d'essayer de nous convaincre
d'être de gauche, de droite, -
15:51 - 15:53avant même d'essayer
de nous convaincre -
15:53 - 15:56qu'il faut peut-être travailler plus,
-
15:56 - 15:59peut-être participer plus
par l'impôt au nom d'un idéal commun. -
16:00 - 16:04Le préalable, c'est comment
on réapprend à communiquer -
16:04 - 16:06dans cette ère à multiples voix
qui donne le vertige -
16:06 - 16:08et comment on recrée un espace
-
16:08 - 16:10et des conditions d'un dialogue collectif
-
16:10 - 16:15qui va permettre de co-construire
à nouveau une identité citoyenne commune. -
16:18 - 16:22Alors comme le dit Eddy dans le film,
-
16:22 - 16:24il faut qu'on bosse sur nous-même.
-
16:24 - 16:27Ça concerne toutes les personnes
de la société sans exception. -
16:27 - 16:28Les riches, les pauvres,
-
16:28 - 16:30les gens des banlieues,
les gens de la ville, -
16:30 - 16:34toutes les religions, les musulmans,
les juifs, les catholiques, -
16:34 - 16:36les bouddhistes,
tout le monde est concerné. -
16:36 - 16:39C'est d'abord pour réussir
ce défi collectif de société, -
16:39 - 16:40c'est d'abord
une révolution personnelle -
16:40 - 16:42qu'on doit entamer sur nous-même
-
16:42 - 16:44puis dans notre cercle familial,
-
16:44 - 16:46puis avec nos potes, au boulot,
-
16:46 - 16:47et c'est uniquement par ce biais-là,
-
16:47 - 16:50et si on prend conscience
de l'urgence de cela -
16:50 - 16:52que l'on peut refaire société
collectivement -
16:52 - 16:54et les institutions accompagneront.
-
16:54 - 16:58Mais c'est d'abord une prise de conscience
qu'on doit faire individuellement. -
17:00 - 17:04Je signe chacune de mes œuvres
par un maillon -
17:05 - 17:07parce que j'appartiens moi-même
à une chaîne, -
17:08 - 17:10à laquelle nous appartenons tous.
-
17:10 - 17:14Nous sommes la génération la plus
interconnectée de l'Histoire. -
17:14 - 17:15En vrai, on est ensemble.
-
17:17 - 17:22Nos vies, nos destins, sont liés
les uns aux autres. -
17:22 - 17:25Apprenons simplement maintenant
à en parler. -
17:25 - 17:26Merci à tous.
-
17:26 - 17:29(Applaudissements)
- Title:
- S'entendre dans un monde à voix multiples | Stéphane de Freitas | TEDxChampsElyseesSalon
- Description:
-
Stéphane de Freitas est un artiste et un entrepreneur social (Projet Indigo), fondateur du concours Eloquentia. Lançons-nous dans une société qui opère en réseaux coopératifs (les valeurs d'écoute, de bienveillance, de soutien et d'échange)...
Stéphane de Freitas est artiste et travaille sur le concept de mixité des opposés. Avec « Indigo », il associe les couleurs opposées de notre imaginaire : le rouge et le bleu, qu'il utilise sous différentes formes pour des performances artistiques. En 2012, il fonde La Coopérative Indigo, une association à but non lucratif. La structure soutient le développement de son concept au cœur d'interactions quotidiennes. Les projets développés ont pour mission d'innover dans la réflexion et la création du lien social et améliorer le vivre ensemble. Elle se distingue notamment par son programme éducatif de prise de parole « Eloquentia ».
Stéphane de Freitas a réalisé un documentaire qui retrace le parcours des étudiants participants à la formation et au concours d'éloquence à l'Université de Saint-Denis, « A Voix Haute ». Aujourd'hui, il développe Indigo, un réseau social d'entraide, une plateforme solidaire d'échanges gratuits de biens et de services, qui récompense la générosité de ses utilisateurs.
Cette présentation a été donnée lors d'un évènement TEDx organisé indépendamment des conférences TED. http://ted.com/tedx
- Video Language:
- French
- Team:
- closed TED
- Project:
- TEDxTalks
- Duration:
- 17:38