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Delete ? | Thierry Bisch | TEDxLimoges

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    A quoi ca sert, un artiste ?
  • 0:23 - 0:26
    Vous pensez peut-être,
    comme l’immense majorité des gens,
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    qu’un artiste, ça délivre des messages.
  • 0:30 - 0:33
    Quand on demandait à Picasso :
  • 0:33 - 0:35
    « Maître, quel est votre message ? »
  • 0:35 - 0:38
    Il répondait : « Mais quel message ?
    Je ne suis pas facteur ! »
  • 0:40 - 0:41
    Un artiste,
  • 0:42 - 0:44
    c'est là pour poser des questions,
  • 0:44 - 0:46
    à lui-même d’abord,
  • 0:46 - 0:47
    au public ensuite
  • 0:47 - 0:50
    qui pourra s’en saisir
    et se la poser à son tour.
  • 0:51 - 0:55
    De la question naît la réflexion
    qui engendrera l'action.
  • 0:57 - 1:00
    L’Anthropocène - Gilles vous
    en a parlé tout à l'heure -
  • 1:00 - 1:05
    c'est le joli nom qu'un grand nombre
    de météorologues et de géologues
  • 1:05 - 1:10
    donnent à la période actuelle
    de l’histoire de notre planète.
  • 1:11 - 1:16
    « Anthropocène », c'est un néologisme
    construit à partir de deux mots grecs :
  • 1:16 - 1:21
    « anthropos », être humain,
    et « kainos », nouveau,
  • 1:21 - 1:24
    en référence à cette nouvelle période
  • 1:24 - 1:29
    où la contrainte géologique dominante,
    c'est devenu l'activité humaine.
  • 1:30 - 1:33
    C’est l’homme, aujourd'hui,
    qui modifie son environnement,
  • 1:33 - 1:35
    qui modifie la planète,
  • 1:35 - 1:38
    et de façon extrêmement dangereuse.
  • 1:39 - 1:41
    Je ne fais que compléter...
  • 1:44 - 1:47
    Mais, « Là où il y a danger
  • 1:47 - 1:49
    croît ce qui sauve. »
  • 1:50 - 1:53
    La célèbre phrase du poète
    Friedrich Hölderlin
  • 1:53 - 1:56
    n’a jamais été autant d’actualité.
  • 1:56 - 1:59
    Les extraordinaires moyens technologiques
  • 1:59 - 2:03
    qui ont permis
    la surexploitation des ressources,
  • 2:05 - 2:09
    ce génie humain peut être mis,
    à mon sens, en miroir,
  • 2:09 - 2:12
    au service de la rédemption,
  • 2:12 - 2:15
    de la réparation.
  • 2:16 - 2:18
    Nous pouvons tous agir,
  • 2:18 - 2:22
    pas seulement les ingénieurs,
    les scientifiques, les techniciens.
  • 2:22 - 2:25
    Non, tous, vous Madame,
    vous Monsieur, moi...
  • 2:25 - 2:29
    Mais pour cela, nous devons résister,
  • 2:29 - 2:31
    résister à l'ambiance...
  • 2:34 - 2:37
    ... dépressive, résister à la fatalité.
  • 2:38 - 2:39
    Résister,
  • 2:39 - 2:43
    c'est combattre l'instinct grégaire
    qui est en chacun d'entre nous.
  • 2:43 - 2:46
    Et là, je veux parler de « consommation ».
  • 2:46 - 2:48
    Ne vous inquiétez pas,
    je ne vais pas vous dire :
  • 2:48 - 2:52
    «il faut tous rouler à vélo, s'éclairer
    à la bougie et vivre sous des tipis.»
  • 2:52 - 2:54
    Non.
  • 2:54 - 2:57
    Je pense plus sérieusement
    que nous pouvons,
  • 2:57 - 2:59
    le plus souvent possible,
  • 2:59 - 3:02
    réfléchir et peser
  • 3:02 - 3:07
    les réelles conséquences
    de nos actes d’achat,
  • 3:07 - 3:11
    par exemple, s’acheter
    un écran plat plus grand,
  • 3:11 - 3:15
    un ordinateur plus puissant,
    une voiture plus confortable
  • 3:15 - 3:18
    ou même une fringue.
  • 3:18 - 3:22
    J’agis en tant que citoyen,
    mais j’agis aussi en tant qu’artiste.
  • 3:22 - 3:27
    Aujourd’hui, je veux mettre
    mon savoir-faire
  • 3:27 - 3:30
    au service du faire savoir.
  • 3:31 - 3:34
    La surexploitation
    des ressources naturelles
  • 3:34 - 3:37
    a eu pour conséquence, entre autres,
  • 3:37 - 3:40
    la disparition d'un grand nombre
    d'espèces animales.
  • 3:41 - 3:47
    En 42 ans, nous avons perdu
    58 % de la faune planétaire,
  • 3:47 - 3:49
    dont 38 % de vertébrés terrestres,
  • 3:50 - 3:52
    parce qu'il y a aussi
    les poissons, les oiseaux, etc.
  • 3:53 - 3:56
    Les animaux, justement,
    il se trouve que c’est mon truc.
  • 3:57 - 3:59
    Mes peintures animalières se vendent
  • 3:59 - 4:01
    dans de très nombreuses
    galeries dans le monde -
  • 4:01 - 4:03
    se vendent très bien -
  • 4:03 - 4:06
    et je pourrais continuer à vivre
    très confortablement de ce travail,
  • 4:06 - 4:08
    sans me poser de questions.
  • 4:08 - 4:11
    Mais j’ai décidé de m’engager, d’agir.
  • 4:11 - 4:15
    Si un artiste ne peut pas agir directement
  • 4:15 - 4:19
    sur les causes de l'extinction,
    sur les causes du déclin,
  • 4:19 - 4:23
    il peut, en revanche, tenter,
    par la puissance de ses œuvres,
  • 4:23 - 4:26
    autant que faire se peut,
  • 4:26 - 4:30
    de convaincre, de rallier
    le plus grand nombre
  • 4:30 - 4:36
    à soutenir ceux qui luttent
    pour la préservation de la biodiversité,
  • 4:36 - 4:38
    par des dons,
  • 4:38 - 4:42
    pour financer les programmes
    de conservation qui coûtent très cher.
  • 4:44 - 4:46
    Je vous rappelle, à cette occasion,
  • 4:46 - 4:49
    que la première campagne de Barack Obama
  • 4:49 - 4:53
    pour les élections présidentielles
    américaines de 2008,
  • 4:53 - 4:57
    a été largement financée par
    des dons de cinq à trente dollars.
  • 4:58 - 5:00
    Cette année,
  • 5:00 - 5:03
    en partenariat avec la Fondation
    Prince Albert II de Monaco,
  • 5:03 - 5:07
    nous avons présenté la première
    campagne « Delete ? ».
  • 5:07 - 5:13
    « Delete ? » est une œuvre que j’ai créée
    pour sensibiliser les populations urbaines
  • 5:13 - 5:17
    à la menace qui pèse
    sur un grand nombre d'espèces.
  • 5:18 - 5:21
    Alors que peindre, pour rallier,
  • 5:21 - 5:24
    pour convaincre,
  • 5:24 - 5:25
    pour séduire ?
  • 5:25 - 5:27
    Lors de nos premières réunions
  • 5:27 - 5:31
    avec mes partenaires
    de la Fondation, en 2015,
  • 5:32 - 5:34
    on en a beaucoup discuté.
  • 5:34 - 5:37
    Les scientifiques pensent -
  • 5:37 - 5:40
    et à raison j'imagine -
  • 5:40 - 5:42
    que la perte des batraciens
  • 5:42 - 5:45
    est beaucoup plus
    dommageable pour l’humanité
  • 5:45 - 5:47
    que celle des éléphants.
  • 5:47 - 5:49
    Mais, je voulais peindre des éléphants.
  • 5:49 - 5:52
    Alors je me suis rappelé
    de cette histoire
  • 5:52 - 5:54
    qui m’avait beaucoup marquée.
  • 5:54 - 5:57
    Savez-vous qui a fait ça ?
  • 5:58 - 6:00
    Il s’appelait Raymond Loewy.
  • 6:00 - 6:03
    C'est le père du design industriel.
  • 6:03 - 6:07
    On lui doit aussi
    le logo des biscuits LU,
  • 6:07 - 6:11
    le paquet de Lucky Strike, la Studbaker,
    beaucoup de produits pour Coca-Cola,
  • 6:11 - 6:16
    enfin bref, des visuels
    mondialement connus.
  • 6:17 - 6:19
    Raymond Loewy,
    quand il était jeune designer
  • 6:19 - 6:21
    dans les années 1940-1950,
  • 6:21 - 6:23
    pour chercher de nouveaux clients,
  • 6:23 - 6:28
    il allait sur les foires industrielles
    voir les fabricants sur leur stand
  • 6:28 - 6:31
    et leur disait :
    « Votre produit est super.
  • 6:31 - 6:34
    Il marche vraiment bien.
    Il est très efficace…
  • 6:34 - 6:37
    Mais bon sang, qu'est-ce qu’il est laid !
  • 6:37 - 6:40
    S’il était beau, vous en
    vendriez beaucoup plus.
  • 6:40 - 6:42
    Et moi je peux vous le rendre beau ! »
  • 6:42 - 6:47
    Et ça a été le leitmotiv de sa vie :
    le beau fait vendre !
  • 6:47 - 6:50
    Pour vendre une idée,
    il ne suffit pas qu’elle soit belle
  • 6:50 - 6:53
    philanthropiquement ou philosophiquement,
  • 6:53 - 6:55
    il faut aussi qu’elle soit belle
    esthétiquement,
  • 6:55 - 6:58
    plastiquement, artistiquement.
  • 6:59 - 7:00
    Parce que l'image,
  • 7:00 - 7:03
    c'est la première chose
    qui vous saisit dans l'espace public.
  • 7:03 - 7:08
    C’est l’image qui va vous convaincre
    de vouloir en savoir plus,
  • 7:08 - 7:13
    bien avant le son,
    bien avant tout autre forme,
  • 7:13 - 7:14
    l'image.
  • 7:14 - 7:19
    Donc, j'ai réussi à convaincre
    mes partenaires d’aller droit au but
  • 7:19 - 7:23
    et de montrer de grands
    et beaux mammifères,
  • 7:24 - 7:27
    comme Panthera Tigris Altaïca.
  • 7:28 - 7:30
    Panthera Tigris Altaïca,
  • 7:30 - 7:35
    c’est le nom taxonomique
    du Tigre de Sibérie ou Tigre de l’Amour.
  • 7:36 - 7:39
    C'est le plus puissant
    de toutes les sous-espèces de tigres.
  • 7:40 - 7:42
    C'est aussi le troisième
    plus grand prédateur terrestre
  • 7:42 - 7:45
    après l’ours kodiak et l’ours polaire.
  • 7:46 - 7:50
    Les grands mâles peuvent peser
    jusqu'à 350-400 kg
  • 7:50 - 7:54
    et mesurer jusqu'à 3,80 m
    au bout de la queue.
  • 7:55 - 7:57
    Le tigre de Sibérie
  • 7:57 - 8:01
    vit au Nord-Est de la Chine
    et en Sibérie Orientale,
  • 8:01 - 8:04
    le long du fleuve Amour - d'où son nom -
  • 8:04 - 8:08
    qui est la frontière naturelle
    entre les deux grands pays.
  • 8:08 - 8:11
    Il vit sur un très vaste territoire
  • 8:11 - 8:16
    qui est aussi un endroit
    géopolitiquement très stratégique.
  • 8:17 - 8:21
    En effet, c’est là que passe
    le plus grand oléoduc du monde,
  • 8:21 - 8:23
    le pipeline ESPO.
  • 8:23 - 8:29
    ESPO va de la Sibérie Orientale
    jusqu'au Pacifique sur plus de 4 000 km,
  • 8:29 - 8:35
    et en 2020, il livrera plus de 80 millions
    de tonnes de pétrole brut
  • 8:35 - 8:39
    à la Chine, au Japon, à la Corée,
  • 8:39 - 8:42
    pour un montant global annuel
    de 125 milliards de dollars.
  • 8:42 - 8:45
    Vous voyez, là, on est dans du lourd.
  • 8:45 - 8:51
    La construction d'ESPO, bien sûr,
    a nécessité de la déforestation,
  • 8:51 - 8:57
    ce qui a partiellement réduit
    l'habitat du tigre
  • 8:57 - 9:01
    mais aussi a ouvert de nouvelles routes
    qui facilitent l’accès des braconniers.
  • 9:01 - 9:06
    Une peau de tigre de Sibérie
    se négocie au marché noir 10 000 €.
  • 9:07 - 9:11
    Alors, les programmes
    de protection coûtent cher.
  • 9:11 - 9:15
    Il faut payer des gens pour surveiller,
    pour lutter contre les braconniers.
  • 9:16 - 9:18
    Ça demande vraiment des fonds.
  • 9:18 - 9:20
    Les sommes investies sont significatives -
  • 9:20 - 9:25
    la Fondation Prince Albert II y participe,
    mais d'autres organisations aussi -
  • 9:25 - 9:27
    mais, les résultats sont payants.
  • 9:28 - 9:30
    On peut le faire.
  • 9:30 - 9:32
    Au milieu des années 1990,
  • 9:32 - 9:36
    on ne comptait plus
    qu’une trentaine de tigres de Sibérie.
  • 9:36 - 9:39
    Aujourd’hui, on en compte à peu près 500,
  • 9:39 - 9:43
    peut-être un peu plus car on soupçonne
    qu'il y en ait en Corée du Nord,
  • 9:43 - 9:46
    mais c'est difficile
    d'aller les compter là-bas.
  • 9:46 - 9:52
    Donc, les programmes payent,
    ce qui a permis à l’UICN -
  • 9:52 - 9:55
    l’Union Internationale
    pour la Conservation de la Nature -
  • 9:55 - 9:58
    de déclasser le tigre de Sibérie
  • 9:58 - 10:02
    sur sa célèbre Liste Rouge
    des espèces menacées
  • 10:03 - 10:09
    de « En danger critique d’extinction »
    à simplement « En danger ».
  • 10:11 - 10:14
    Alors, j'en reviens à mon introduction.
  • 10:14 - 10:17
    Un artiste est là
    pour poser des questions.
  • 10:17 - 10:20
    Ma question, c'est « Delete ? »,
  • 10:21 - 10:23
    en français : « Supprimer ? ».
  • 10:24 - 10:28
    « Delete ? », c'est un pictogramme
    informatique universellement connu.
  • 10:28 - 10:33
    C’est le moyen ordinaire de supprimer
    un fichier de son ordinateur.
  • 10:35 - 10:40
    J’ai adapté ce pictogramme banal
  • 10:40 - 10:44
    à une réalité tangible, tragique,
  • 10:44 - 10:47
    qui est la disparition et la menace
  • 10:47 - 10:50
    qui pèse sur un grand nombre d'espèces,
  • 10:50 - 10:54
    en montrant sur de grandes bâches
    accrochées dans les rues,
  • 10:54 - 10:58
    ou par des projections nocturnes,
  • 10:58 - 11:02
    des mammifères, des animaux
    en train de disparaître,
  • 11:02 - 11:04
    de façon très théâtrale.
  • 11:04 - 11:09
    Lors de la création de toutes
    ces toiles dans mon atelier,
  • 11:09 - 11:13
    j'ai photographié la progression du travail
  • 11:13 - 11:15
    presque image par image.
  • 11:16 - 11:19
    Ça nous a permis d'avoir
    d'abord de très bonnes images
  • 11:19 - 11:21
    pour pouvoir imprimer
    ces grandes bâches,
  • 11:22 - 11:23
    et ensuite,
  • 11:25 - 11:27
    en regardant ces images,
  • 11:28 - 11:31
    de la dernière - c'est-à-dire
    où la toile est terminée -
  • 11:31 - 11:35
    jusqu'à la première en remontant
    à l'envers jusqu'au fond vide,
  • 11:35 - 11:39
    on voit l’animal doucement disparaître.
  • 11:39 - 11:42
    Nous avons donc monté
    des petits vidéogrammes
  • 11:43 - 11:46
    qui ont été projetés
    pour la première fois,
  • 11:46 - 11:50
    pendant tout l’été, la nuit,
    sur les remparts du palais princier.
  • 11:50 - 11:54
    Les gens pouvaient voir, en direct,
  • 11:54 - 11:57
    la disparition de grands mammifères.
  • 11:58 - 12:02
    « Delete ? » fait appel
    à notre cerveau reptilien.
  • 12:02 - 12:06
    Quand nous voyons
    apparaître le pictogramme,
  • 12:06 - 12:11
    nous sentons notre index prêt à cliquer,
    mais dans le même temps,
  • 12:11 - 12:15
    nous sentons un impérieux
    besoin de résister…
  • 12:19 - 12:22
    (Applaudissements)
Title:
Delete ? | Thierry Bisch | TEDxLimoges
Description:

« Delete ? » est une oeuvre internationale de Thierry Birsch, peintre animalier, visant à sensibiliser les populations sur la menace imminente de disparition d'un grand nombre d'espèces. A travers l'exemple d'une de ses animations, il nous fait partager sa décision d'agir pour la protection des espèces animales en voie de disparition. Vous ne verrez plus jamais la touche « Delete » de la même façon.

Cette présentation a été donnée lors d'un évènement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment des conférences TED. En savoir plus : http://ted.com/tedx

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
12:28

French subtitles

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