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Et si nous vivions sans argent ? | Benjamin Lesage | TEDxBordeaux

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    Et si nous vivions sans argent
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    et pouvions, d'un coup de baguette
    magique, supprimer la monnaie,
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    vivre dans un monde où on partagerait
    les ressources que la Terre nous donne ?
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    Est-ce que ça vous plairait ?
    Public : Oui.
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    Ça vous tente ?
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    J'ai commencé à me poser
    la question aux Pays-Bas.
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    J'étudiais le marketing
    à l'Université de La Haye.
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    Du marketing à l'idée de vivre sans argent
    il y a un sacré pas à faire... ou pas.
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    D'une certaine manière,
    j'avais entraperçu ce monde
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    que Frédéric Beigbeder dépeint
    dans son livre « 99 francs »,
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    le monde de la pub
    et du marketing qui consiste
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    à déculpabiliser le consommateur,
    pour lui vendre des produits
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    bons ni pour lui,
    ni pour son environnement.
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    C'est là que j'ai commencé
    sérieusement à douter.
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    J'étais quelqu'un de plutôt normal.
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    J'aimais bien les soirées
    bien arrosées, les parties de foot.
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    Les nouvelles de ce qui se passait dans
    le monde ne m'affectaient pas vraiment.
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    Puis, j'ai commencé à visionner
    une série de documentaires
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    qui m'ont permis d'ouvrir les yeux,
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    de comprendre que mon quotidien,
    mes achats, ce que je faisais,
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    avait un impact direct sur le monde,
    que ça créait des injustices.
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    Là, je me suis dit :
    « Ben, il faut que tu changes. »
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    J'avais deux amis, Raphaël et Nicolas.
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    Ensemble, on a commencé
    à procéder à une série de changements.
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    Nous sommes devenus végétariens.
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    Nous avons commencé à boycotter certains
    produits ni éthiques ni écologiques.
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    Nous avons fait attention
    à la consommation d'eau
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    et surtout, nous nous sommes
    mis à faire de l’auto-stop.
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    Un soir, on s'est retrouvé
    dans une station essence,
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    en pleine nuit, bloqués : il n'y avait
    plus beaucoup de trafic.
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    L'endroit n'était pas particulièrement
    bucolique, mais on se sentait très bien.
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    On a même eu une idée.
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    On s'est dit : « Ce serait super
    de partir comme ça, à l'aventure,
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    de voyager libres, sans argent. »
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    Donc nous voilà, six mois plus tard,
    un Allemand, un Français, un Italien,
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    sur le bord d'une route aux Pays-Bas.
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    Ça commence comme une blague,
    mais c'est une histoire sérieuse.
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    L'idée avait d'ailleurs évolué.
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    On avait acheté des sacs à dos solaires
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    pour entreprendre un voyage jusqu'au
    Mexique en auto-stop et bateau-stop.
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    On voulait en faire un documentaire aussi.
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    On avait deux objectifs principaux :
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    une empreinte écologique
    la plus basse possible,
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    et sans argent, pour ne consommer
    que ce qui est déjà là.
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    Les premières 24 heures
    ont été intenses.
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    On a fait moins de 50 km.
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    On s'est retrouvé dans une cage d'escalier
    à grelotter jusqu'au lendemain.
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    Il faisait - 10 °C dehors. Partir
    en janvier n'était pas une bonne idée.
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    Mais surtout on était affamés.
    Le lendemain, on attend quatre heures.
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    Personne ne nous prend en stop,
    et on commence à douter.
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    On voulait faire les malins mais peut-être
    qu'on n'était pas capables de le faire.
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    Heureusement une voiture s'arrête,
    le destin nous a répondu.
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    Nous continuons, nous traversons
    la Belgique, la France.
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    D'une aire d'autoroute à une autre,
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    nous grappillons les restes
    sur les plateaux-repas,
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    et nous arrivons,
    cinq jours plus tard, à Barcelone.
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    C'est une première étape importante.
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    Nous rencontrons un groupe de déjantés
    qui viennent d'un peu partout
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    et vivent sans argent ou presque,
    dans des squats,
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    des appartements
    ou des maisons abandonnés,
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    et nous initient à l'art de la récup.
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    Nous apprenons à fouiller
    et à demander à la fin des marchés,
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    dans les restaurants,
    les boulangeries, pour nous nourrir.
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    Nous découvrons l'ampleur du gaspillage
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    et que se nourrir sans argent n'est
    malheureusement pas un problème.
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    Nous continuons, ensuite,
    jusqu'au sud de l’Espagne.
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    Nous trouvons la combine
    avec les camionneurs
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    qui ont droit chacun
    de prendre un copilote avec eux.
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    Nous pouvons donc embarquer
    à bord du ferry vers l’Afrique.
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    Nous posons le premier pas au Maroc,
    c'est un vrai choc culturel.
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    Nous ressemblons vraiment
    à des vagabonds à ce stade.
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    Nous sentons mauvais,
    on ne peut pas s'y tromper.
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    Nous apprenons vite à expliquer
    ce que nous faisons aux Marocains
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    avec deux mots assez simples
    « walouf flouze ».
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    Là, les portes s'ouvrent,
    les gens nous comprennent
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    et nous découvrons
    une générosité sans pareil.
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    Moussa, par exemple, nous trouve
    sur le bord d'une route en pleine nuit.
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    Il s'arrête sans peur et insiste même
    pour nous emmener chez lui.
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    Il veut que nous restions trois jours,
    car c'est écrit dans le Coran,
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    quand on rencontre un voyageur,
    il faut lui donner le gîte et le couvert.
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    Le plus fort, c'est qu'au matin
    du quatrième jour,
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    il débarque dans l'appartement :
    « Ça y est, j'suis papa ! ».
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    Il nous emmène à l'hôpital, insiste pour
    que nous prenions le bébé dans nos bras,
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    et nous nous parlions en allemand,
    en italien et en français,
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    et il nous dit que nous sommes
    comme les trois mages
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    venus annoncer la venue
    de son fils qu'il a nommé Iahia, l'élu.
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    Cette générosité se répète pendant les six
    semaines que nous passons au Maroc,
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    durant lesquelles nous cherchons
    une embarcation pour les îles Canaries.
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    Finalement, un Belge à Agadir,
    avec un petit voilier de 10 m,
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    accepte de nous prendre.
    Bien entendu, nous sautons de joie.
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    Pour nous, c'est le premier
    obstacle franchi.
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    Mais la joie est de courte durée. Trente
    minutes plus tard, nous sortons du port.
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    Ça tangue sérieusement et on se retrouve
    en cale à vomir jusqu'au lendemain.
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    Ce n'est pas très réjouissant
    mais ce n'est pas grave, nous arrivons.
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    Aux Canaries, nous passons environ
    un mois et demi.
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    Tous les matins, nous allons au port
    rencontrer les marins, les capitaines,
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    essayer de se faire accepter,
    et trouver un bateau pour les Amériques.
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    Nous vivons dans un squat, nous
    perfectionnons notre art de la récup,
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    et nous attendons.
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    Finalement, nous tombons
    sur deux Italiens, Marco et Francesco,
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    qui avaient mis
    une annonce à la capitainerie.
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    Ils cherchaient deux filles, de préférence
    blondes, pour faire la traversée.
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    Vous l'avez compris,
    ils n'ont pas trouvé
  • 5:15 - 5:17
    et ils ont accepté
    de nous prendre à leur place.
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    Le deal était simple : on nettoie,
    on cuisine, on prend nos quarts,
  • 5:21 - 5:23
    on leur enseigne
    le français et l'espagnol,
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    et nous voilà partis pour l'aventure.
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    Pour nous, c'est génial, c'est le vrai
    obstacle du voyage qui saute.
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    A bord, c'est une expérience magnifique,
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    et surtout, une opportunité pour prendre
    du recul par rapport à ce voyage,
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    car beaucoup nous le répètent,
    vous-même y pensez aussi peut-être,
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    et le capitaine nous
    le dit chaque matin :
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    « Vous ne voyagez pas sans argent,
    vous voyagez avec l'argent des autres. »
  • 5:44 - 5:46
    Il n'a pas tort d'une certaine manière.
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    L'essence, l'électricité, les invendus
    récupérés sont produits avec de l'argent.
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    Mais notre voyage
    va au-delà de cet aspect matériel.
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    L'idée est d'apprendre
    à ne plus rien contrôler,
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    de vivre de ce que la vie nous donne,
    de ce que les gens nous apportent,
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    de lâcher prise.
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    C'est aussi la découverte d'un autre
    monde, d'une autre réalité.
  • 6:06 - 6:13
    Nous créons un lien plus humain
    avec les gens que nous rencontrons,
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    c'est ça qui nous anime, et nous
    commençons à rêver d'un monde meilleur.
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    La traversée dure trois semaines
    jusqu'au Brésil.
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    Là, c'est un nouveau choc.
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    On se retrouve avec des centaines
    de frères infortunés
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    qui eux aussi vivent sans argent,
    sauf qu'ils ne l'ont pas choisi.
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    Pour manger, c'est difficile ;
    nous grappillons quelques restes,
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    mais nous ne pouvons pas
    nous remplir l'estomac.
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    Pour Nicolas, c'est difficile.
    Il en a marre de ce trip masochiste.
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    Il n'est pas vraiment convaincu
    avec cette idée d'argent.
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    Pour lui, c'est un outil qui peut
    être utilisé à bon escient.
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    Il ne comprend pas
    notre quête comme nous.
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    Mais Raphaël et moi sommes très têtus ;
    nous avons découvert la pauvreté
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    et nous avons envie
    de l'expérimenter jusqu'au bout.
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    Nous décidons donc de continuer.
  • 6:52 - 6:55
    Nous nous séparons, et Raphaël
    et moi reprenons la route.
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    Nous nous retrouvons bloqués pendant
    trois jours dans une station essence.
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    Au matin du quatrième jour,
    je me réveille en panique.
  • 7:01 - 7:05
    Toutes mes affaires ont disparu,
    mon sac à dos, la caméra, tout.
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    Sur le coup, c'est terrible.
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    J'imagine que c'est arrivé
    à certains d'entre vous en voyage,
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    ça fait un peu partie du trip.
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    Mais moi, je ne sais pas quoi faire.
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    Le sac à dos, ça veut dire l'ordinateur
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    et plein de choses
    pour faire le documentaire.
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    C'est la brosse à dents et ces petites
    choses importantes du quotidien.
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    C'est le passeport et la carte bancaire
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    que je gardais dissimulée
    dans le sac, au cas où.
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    Difficile, mais assez vite je réalise
  • 7:29 - 7:32
    que c'est peut-être le destin
    qui me donne un coup de pouce.
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    Cela faisait des mois que je vantais
    l'idée d'un voyage sans argent,
  • 7:35 - 7:38
    que je débattais avec tous
    de l'importance de ce que nous faisions.
  • 7:38 - 7:41
    Il fallait que je le fasse
    sans la sécurité de la carte bancaire.
  • 7:41 - 7:45
    Désormais, j'étais ce que je prétendais
    être, un voyageur sans argent.
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    Nous avons repris la route et Niévès
    nous a rejoints, la copine de Raphaël.
  • 7:50 - 7:53
    Avec ses belles jambes, son sourire,
    tout est devenu plus simple.
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    Bizarrement, nous n'attendions
    plus sur les routes.
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    Il était facile de trouver un logement,
    et nous avions l'estomac plein.
  • 7:59 - 8:03
    Cela nous a permis de voir autre chose,
    d'autres aspects du voyage,
  • 8:03 - 8:07
    particulièrement les injustices
    qui jalonnaient notre route.
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    Par exemple, des champs d'ananas
    sur-pollués de pesticides
  • 8:09 - 8:11
    pour répondre à la demande européenne,
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    des hangars immenses où des milliers
    de poules sont entassés pour pondre,
  • 8:15 - 8:18
    ces maquilas ou ces sweat-shops,
    ces entreprises détaxées
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    pour produire des jeans à bas coût
    pour les grandes marques,
  • 8:21 - 8:23
    et les cancers des travailleurs
    qui sont ignorés...
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    Autant de rencontres qui nous
    confirment dans nos choix.
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    Cette idée de vivre sans argent,
  • 8:28 - 8:31
    de remettre en cause ce système
    financier n'est pas vaine.
  • 8:31 - 8:35
    Nous décidons de devenir vegan pour plus
    de cohérence, consommer le moins possible,
  • 8:35 - 8:37
    et nous repartons de plus belle.
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    Nous arrivons au Mexique
    onze mois après le départ :
  • 8:41 - 8:44
    25 000 km parcourus,
    des centaines de rencontres,
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    et un rêve plus persistant :
    et si nous pouvions vivre sans argent ?
  • 8:49 - 8:52
    Car certes, ce voyage n'a pas été
    totalement sans argent.
  • 8:52 - 8:54
    Nous avons même utilisé 70 €
    pour refaire mon passeport,
  • 8:54 - 8:57
    et payer quelques taxes aux frontières.
  • 8:57 - 8:59
    Nous avons surtout découvert
    une autre réalité,
  • 8:59 - 9:01
    un monde fait de partage, d’entraide,
  • 9:01 - 9:05
    où les humains se donnent, s'échangent
    les ressources disponibles.
  • 9:06 - 9:08
    C'est ce qui nous amène
    à retourner en Europe.
  • 9:08 - 9:12
    Pour moi, le retour en France
    est synonyme de retour à la réalité.
  • 9:12 - 9:15
    Il prend la forme d'une douleur
    lancinante au niveau des molaires.
  • 9:15 - 9:20
    J'ai 22 caries, sûrement grâce au thé
    que les Marocains offrent à tout va.
  • 9:20 - 9:22
    (Rires)
  • 9:23 - 9:26
    Vous allez me dire, se balader
    sans argent, c'est une chose,
  • 9:26 - 9:28
    mais pour se soigner, comment fait-on ?
  • 9:28 - 9:31
    J'avoue avoir du mal à y croire
    quand ma sœur me présente sa dentiste
  • 9:31 - 9:33
    qui avait suivi mon aventure
    et qui me dit :
  • 9:33 - 9:35
    « Ok, on peut faire un deal
    non monétaire. »
  • 9:35 - 9:38
    Elle me soigne mes dents
    car il y avait urgence
  • 9:38 - 9:40
    et trouve une compensation avec sa mère.
  • 9:40 - 9:43
    Je me retrouve donc à tenir compagnie
    à une vieille dame de 84 ans,
  • 9:43 - 9:46
    à m'occuper de son jardin,
    faire des petites réparations
  • 9:46 - 9:48
    et surtout à l'écouter.
  • 9:48 - 9:52
    Ça dure un mois et demi ; c'est une
    expérience très riche et une confirmation.
  • 9:52 - 9:55
    J'imagine ce monde où il y aurait
    des personnes avec des besoins,
  • 9:55 - 9:59
    et d'autres personnes avec des
    ressources, et que tout s'équilibre.
  • 9:59 - 10:01
    J'avais besoin d'un soin,
    une dentiste m'a aidé.
  • 10:01 - 10:04
    Une dame avait besoin de présence,
    j'ai pu la lui donner.
  • 10:04 - 10:06
    Alors, je me dis que c'est possible.
  • 10:06 - 10:10
    Un seul problème, un vrai hic,
    c'est que ce n'est pas légal.
  • 10:11 - 10:13
    C'est du travail au noir.
  • 10:13 - 10:15
    Ça ne rentre pas
    dans le cadre juridique légal.
  • 10:15 - 10:19
    Vendre des armes, ça l'est en France ;
    par contre, donner un coup de main, non.
  • 10:19 - 10:20
    Donc, nous avons un vrai problème.
  • 10:20 - 10:24
    Pourtant, j'en suis convaincu,
    l'économie du don est faisable
  • 10:24 - 10:27
    et une réelle alternative économique
    pour ce système.
  • 10:27 - 10:30
    Certains économistes la défendent :
    Bernard Maris, Jean-Michel Cornu,
  • 10:30 - 10:32
    et même Charles Eisenstein aux États-Unis.
  • 10:33 - 10:35
    Ils stipulent que cette économie
    est l'une des seules
  • 10:35 - 10:38
    qui puissent permettre une distribution
    équitable des richesses
  • 10:38 - 10:40
    selon les besoins de chacun.
  • 10:40 - 10:42
    Le gros avantage,
    c'est que le don rend heureux
  • 10:42 - 10:45
    autant celui qui donne
    que celui qui reçoit.
  • 10:45 - 10:47
    Le problème, c'est la comptabilisation.
  • 10:47 - 10:50
    Peut-on comptabiliser l'économie du don ?
  • 10:50 - 10:51
    Non, c'est impossible.
  • 10:51 - 10:54
    C'est d'ailleurs contraire à son principe
    de base, l'inconditionnalité.
  • 10:54 - 10:57
    Que faire ? Comment le légaliser ?
  • 10:58 - 11:01
    Une seule idée et une piste :
    le mettre en pratique.
  • 11:01 - 11:05
    C'est là que notre projet
    d'écovillage prend son sens.
  • 11:05 - 11:08
    Nous voulons ouvrir un espace,
    une sorte de laboratoire vivant,
  • 11:08 - 11:10
    pour expérimenter l'économie du don,
  • 11:10 - 11:13
    donner de notre temps,
    de notre énergie, de nos surplus,
  • 11:13 - 11:17
    sans rien attendre en retour - se calquer,
    en gros, sur le modèle naturel,
  • 11:17 - 11:20
    sur l'arbre qui donne ses fruits.
  • 11:20 - 11:23
    Concrètement, nous donnerons
    des paniers de fruits et légumes bio
  • 11:23 - 11:25
    à ceux qui ne peuvent pas se l'offrir.
  • 11:25 - 11:28
    On donnera des cours de français,
    d'espagnol, de musique, d'orthophonie,
  • 11:28 - 11:32
    d'architecture naturelle, organisera
    des conférences, des TEDxTalks,
  • 11:32 - 11:34
    des ateliers pour faire
    des panneaux solaires
  • 11:34 - 11:37
    ou toutes sortes
    de machines sans électricité.
  • 11:37 - 11:39
    Nous participerons
    dans la vie des communes,
  • 11:39 - 11:42
    les aiderons à s'orienter
    vers une politique de zéro déchet,
  • 11:42 - 11:44
    passerons du temps
    avec les personnes âgées,
  • 11:44 - 11:47
    créerons toutes sortes d'activités,
    et surtout, nous ouvrirons l'espace
  • 11:47 - 11:50
    pour que d'autres viennent
    expérimenter avec nous,
  • 11:50 - 11:53
    pour apprendre à recevoir car au final,
    c'est ce qu'il y a de plus dur -
  • 11:53 - 11:57
    donner est facile mais recevoir est
    difficile dû au sentiment d'infériorité -
  • 11:57 - 12:02
    apprendre à recevoir pour ensuite,
    pouvoir donner en toute humilité.
  • 12:02 - 12:04
    Ce ne sera pas parfait.
  • 12:04 - 12:07
    Nous donnerons en fonction
    de nos ressources,
  • 12:07 - 12:10
    et quand nous aurons besoin
    de quelque chose, nous le demanderons.
  • 12:10 - 12:13
    Ça fonctionne comme le karma.
    Nous y croyons.
  • 12:14 - 12:16
    Ça peut paraître utopique,
  • 12:16 - 12:19
    mais c'est pour ça que le projet
    s'appelle « Eotopia »,
  • 12:19 - 12:23
    car l'utopie est, comme l'horizon,
    un objectif vers lequel il faut tendre.
  • 12:23 - 12:26
    Il y aura aussi des taxes
    et des impôts à payer,
  • 12:26 - 12:28
    et d'autres charges sûrement.
  • 12:28 - 12:30
    Nous ferons appel à des dons financiers
  • 12:30 - 12:32
    que nous utiliserons
    en toute transparence.
  • 12:32 - 12:35
    Nous utiliserons de l'argent au début.
  • 12:35 - 12:39
    Nous sommes convaincus qu'après,
  • 12:39 - 12:41
    nous devrons trouver
    le moyen de faire sans.
  • 12:41 - 12:45
    Il faudra que nous trouvions le moyen
    de montrer ce prototype,
  • 12:45 - 12:47
    de s'orienter vers une société nouvelle,
  • 12:47 - 12:51
    pour que la société se force
    à définir un cadre légal,
  • 12:51 - 12:55
    parce que l'économie du don
    est quelque chose qui existe.
  • 12:55 - 12:58
    Sept milliards d'êtres humains
    l'utilisent au quotidien.
  • 12:58 - 13:00
    Vous-même, vous donnez.
  • 13:00 - 13:03
    Lever la main ceux qui donnent
    au quotidien du temps, de l'énergie.
  • 13:03 - 13:06
    Voilà ! Tout le monde !
    On est tous dans le don.
  • 13:06 - 13:11
    Sauf que le don n'est pas
    une économie légale, reconnue.
  • 13:11 - 13:17
    Alors, que pouvons-nous faire pour
    que cette économie reprenne sa place ?
  • 13:17 - 13:20
    Avant, c'était le seul système
    économique naturel existant.
  • 13:21 - 13:23
    Nous pouvons expérimenter,
  • 13:23 - 13:26
    créer des espaces de gratuité,
    des écovillages comme Eotopia,
  • 13:26 - 13:30
    tout simplement donner aujourd'hui,
  • 13:31 - 13:34
    continuer à alimenter cette économie
    pour que, petit à petit, elle enfle
  • 13:34 - 13:38
    et prenne de la place
    par rapport à l'économie financière.
  • 13:38 - 13:40
    Si, comme moi, vous êtes persuadé
    que l'économie actuelle
  • 13:40 - 13:44
    basée sur la monnaie et les finances,
    crée des inégalités,
  • 13:45 - 13:47
    et que vous aimeriez la changer,
  • 13:47 - 13:50
    en vous disant que c'est impossible,
    que nous sommes impuissants,
  • 13:50 - 13:53
    eh bien, je n'ai pas de grandes
    théories, désolé - j'aimerais -
  • 13:53 - 13:57
    mais juste une simple invitation : donner,
    donner un peu plus chaque jour,
  • 13:57 - 14:01
    fortifier cette économie du don,
    cette économie parallèle,
  • 14:01 - 14:04
    pour qu'elle étouffe peu à peu
    cette autre économie.
  • 14:04 - 14:06
    Je suis sûr que nous
    pourrions arriver, un jour,
  • 14:06 - 14:09
    à répondre à tous
    nos besoins dans le don,
  • 14:09 - 14:11
    si nous nous y mettons tous ensemble.
  • 14:11 - 14:13
    Voilà, donnons
    parce que la Nature donne,
  • 14:13 - 14:16
    donnons parce que ça nous rend
    heureux aujourd'hui et pour demain.
  • 14:16 - 14:18
    Merci.
  • 14:18 - 14:20
    (Applaudissements)
Title:
Et si nous vivions sans argent ? | Benjamin Lesage | TEDxBordeaux
Description:

C'est une question que beaucoup d'économistes, d'anthropologistes et de philosophes se sont posée. L'économie du don, ça existe et c'est possible. Elle est basée sur le concept de la gratuité, sur le don sans réciprocité, « sur la réalisation que la générosité est au coeur de la nature humaine, et la conviction que donner, c'est recevoir » comme le dit Charles Eisenstein. Benjamin croit que si nous nous y mettons tous, si nous donnons tous activement, c'est tout le visage de notre société qui peut changer.

Né à Besançon, en Franche-Comté, Benjamin Lesage part pour les Pays-Bas à 21 ans pour étudier et s’ouvrir au monde. Trois ans plus tard, en compagnie de deux amis, il initie un voyage écologique sans le sou, en auto-stop et en bateau-stop qui l’emmène des Pays-Bas jusqu’au Mexique. Pendant ce voyage, il découvre une toute autre économie basée sur l’entraide et le partage, et dénuée d’échanges monétaires. Fort de cette expérience, il continue son parcours initiatique au Mexique, aux Etats-Unis et ensuite en Europe en promouvant ce qu’on appelle « l’économie du don » partout où il va. De retour en France, il publie son livre « Sans un sou en poche » (Ed. ARTHAUD, 2015). Il s'est regroupé avec d’autres pour créer un projet d’éco-lieu basé sur l’économie du don, le stlye de vie végan et la permaculture : Eotopia.

Cette présentation a été donnée lors d'un évènement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment des conférences TED. En savoir plus : http://ted.com/tedx

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
14:34

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