Avoir le sens de l'humour en Afghanistan ? L'artiste Aman Mojadidi nous montre comment.

L'artiste américano-afghan se nomme lui-même “Afghan de sang, plouc par la grâce divine.” En jouant sur ses deux identités, les oeuvres audacieuses, drôles et stimulante de ce TED Fellow explorent le jihad, le gangstérisme, les consommateurs et la corruption dans l'Afghanistan moderne.

(Applaudissements)

J'arrive en camion avec plus ou moins 50 rebelles

à la bataille de Jalalabad

comme un surfeur végétarien de 19 ans de Jacksonville en Floride.

(Rires)

J'ai troqué mes baskets 'Converse' noires

pour une paire de sandales de cuir marron

et j'ai lancé une fusée vers des chars gouvernementaux

que je ne voyais même pas.

Et c'était la première fois que j'allais en Afghanistan.

Bien avant ça j'avais grandi avec la guerre,

mais dans le cadre de soirées pyjamas le week-end, les parties de foot le samedi,

les combats à poings nus avec les enfants racistes de la Confédération

et les manifs nationalistes et religieuses

en scandant, "à bas le communisme et vive l'Afghanistan,"

et en brûlant des effigies de Brejnev avant de savoir ce que ça voulait dire.

Mais ça c'est la géographie du moi.

Et donc je suis ici aujourd'hui,

un Afghan de sang, un plouc par la grâce divine,

(Rires)

un athée et un artiste radicalement politisé

qui depuis neuf ans vit, travaile, crée

en Afghanistan.

Il y a beaucoup de choses merveilleuses qu'on peut utiliser

pour créer de l'art en Afghanistan,

mais en ce qui me concerne, je ne veux pas peindre des arcs-en-ciel ;

je veux faire l'art qui bouscule l'identité,

qui défie l'autorité,

qui expose l'hypocrisie,

qui réinterpréte la réalité,

et qui utilise même un genre d'ethnographie imaginative

pour essayer de comprendre le monde dans lequel nous habitons.

Je veux passer un jour dans la vie d'un gangster djihadiste

qui porte son djihad contre les communistes

comme le clinquant d'une popstar

et se sert de l'intimidation religieuse armée et de la corruption politique

pour devenir riche.

(Rires)

Et qu'est-ce que le gangster djihadiste peut faire d'autre, à part être candidat au parlement

et faire une campagne d'installation publique

avec le slogan : "Votez pour moi! J'ai fait le djihad, et je suis riche."

(Rires)

Et essayer d'utiliser cette campagne pour exposer ces mafieux

qui se font passer pour les héros nationaux.

Je veux examiner la corruption en Afghanistan

à travers une oeuvre intitulée : Vengeance

et imiter un policier,

installer un faux poste de contrôle dans la rue de Kaboul et arrêter des voitures,

mais au lieu de demander un pot-de-vin, donner de l'argent

et m'excuser au nom des des services de police de Kaboul ,

(Applaudissements)

en espérant qu'ils accepteront ce billet de 100 Afghanis en notre nom.

Je veux examiner comment, à mon avis,

le conflit en Afghanistan est devenu un conflit "chic".

La guerre et la vie expatriée qui va avec

ont créé cet environnement de style et de mode

qui ne peut qu'être décrit

en créant une ligne de mode pour les soldats et les kamikazes

dans laquelle je prend de la fourrure de renard afghan et je l'ajoute au gilet pare-balles

ou je fais nombreuses poches intérieurs

pour les gilets néotraditionaux à la mode.

Et j'aimerais examiner comment prendre une simple brouette de Kaboul

et la mettre sur le mur au milieu de l'appel de Kipling de 1899

pour engendrer un dialogue à propos de ma perception des initiatves contemporaines pour le développement

comme étant enracinées dans la rhétorique coloniale d'hier

à propos du "fardeau du blanc"

pour sauver le basané de lui-même

et peut-être le civiliser un peu.

Mais, faire ces choses-là peut vous envoyer en prison,

elles peuvent être mal comprises, mal interprées.

Mais je les fais parce que je le dois,

parce que la géographie du moi le rend obligatoire.

Ça c'est mon fardeau. C'est quoi le vôtre ?

Merci.

(Applaudisements)