La binarité, c'est pas mon genre | Antonin Le Mée | TEDxRennes
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0:14 - 0:16Messieurs, bonjour.
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0:17 - 0:19Je ne dis pas « mesdames ».
C'est un gain de temps. -
0:19 - 0:21Et messieurs,
ça fait plus professionnel. -
0:22 - 0:23En plus, si on dit « mesdames »,
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0:24 - 0:26est-ce qu'on doit dire
« mesdemoiselles » ? -
0:26 - 0:27Y a des femmes là
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0:27 - 0:29qui ne sont pas mariées ?
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0:29 - 0:30C'est important que je le sache.
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0:30 - 0:31Des hommes non mariés.
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0:31 - 0:33Non, ça n'a aucune importance.
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0:33 - 0:37En plus, bon, mesdemoiseaux,
ça fait un peu vieux jeu, non ? -
0:38 - 0:39Donc, je dis juste :
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0:39 - 0:40bonjour, messieurs.
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0:40 - 0:42Et c'est très bien comme ça.
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0:42 - 0:44Non ? Hum.
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0:45 - 0:48Pourquoi pas...
Gauchers, droitiers, bonjour. -
0:48 - 0:51Je classe aussi des gens en 2 catégories.
Ça paraît bien, non ? -
0:52 - 0:54Ah, mince ! Les ambidextres.
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0:54 - 0:55Ou alors ...
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0:55 - 0:57Juste ...
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0:57 - 0:59Bonjour.
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0:59 - 1:02Est-ce vraiment capital de souligner
le genre des personnes qu'on salue ? -
1:02 - 1:03Pourquoi notre éducation
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1:03 - 1:05nous a appris que c'est plus poli ?
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1:05 - 1:07Bonjour, monsieur.
Bonjour, madame. -
1:08 - 1:09C'est un automatisme.
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1:09 - 1:10On le dit comme ça.
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1:10 - 1:11Sans réfléchir.
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1:11 - 1:15C'est marrant parce que moi,
quand j'entre dans un commerce, -
1:15 - 1:17les gens sont obligés de réfléchir.
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1:17 - 1:20Avec mon apparence, beaucoup de gens
se retrouvent en difficulté, -
1:21 - 1:23et donc j'ai régulièrement
le droit à des : -
1:23 - 1:26« Bonjour, mons... mada ... mons... »
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1:27 - 1:28« Bonjour, mon petit bonhomme. »
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1:29 - 1:32Voire, « bonjour, messieurs-dames »,
quand je suis tout seul. -
1:33 - 1:37Rappel : j'ai 28 ans
et je suis une seule personne. -
1:37 - 1:40Cette hésitation
quand on me dit bonjour -
1:40 - 1:43est toujours accompagnée
d'un malaise palpable -
1:43 - 1:44chez la personne en face de moi :
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1:44 - 1:46elle attend une réponse.
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1:46 - 1:49Ça semble indispensable
pour la suite de notre interaction. -
1:49 - 1:51Monsieur ou madame.
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1:51 - 1:52Homme ou femme.
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1:53 - 1:54La réponse ?
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1:54 - 1:56Pour moi, c'est monsieur.
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1:56 - 1:58Mais ce n'est ni homme ni femme.
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1:59 - 2:00Je m'explique.
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2:00 - 2:03Monsieur est l'interface sociale
que j'utilise. -
2:03 - 2:05Ça traduit l'expression de mon genre.
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2:05 - 2:08J'ai un prénom masculin.
On parle de moi au masculin. -
2:08 - 2:11Exemple :
Antonin, il est petit mais costaud. -
2:12 - 2:14En revanche, on me pose souvent
la question : -
2:14 - 2:17« Mais tu es un homme ou une femme ? »
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2:18 - 2:20Eh bien, la meilleure réponse
que j'ai trouvée, -
2:20 - 2:22c'est « Non ».
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2:23 - 2:26Mon identité de genre
se situe en dehors de ces deux cases : -
2:26 - 2:27homme/femme.
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2:27 - 2:29On dit que mon genre
est non-binaire. -
2:30 - 2:32Ce qui, somme toute,
est assez amusant : -
2:32 - 2:33je suis informaticien,
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2:33 - 2:35le binaire
ne me fait pourtant pas peur. -
2:36 - 2:39Mais la société occidentale
aime la binarité. -
2:39 - 2:41Ça la rassure.
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2:41 - 2:45Alors, bien souvent, elle me force
à choisir soit homme, soit femme. -
2:46 - 2:48Dans les formulaires
à la question « sexe », -
2:48 - 2:51quand je peux, je ne coche
aucune des deux cases -
2:51 - 2:52ou bien je coche les deux.
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2:52 - 2:53Le petit malin
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2:53 - 2:56qui fait ça dans les sondages,
c'est moi. -
2:56 - 2:58Et puis, quand j'ai
vraiment pas le choix, -
2:58 - 2:59je coche « homme »,
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3:00 - 3:02c'est ce qui est
plus proche de mon identité. -
3:03 - 3:07Pourquoi on veut savoir
si je suis un homme -
3:07 - 3:09quand on étudie
ma consommation de café -
3:10 - 3:10ou quand je fais
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3:10 - 3:12ma carte de bibliothèque ?
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3:12 - 3:13On ne me demande pas
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3:13 - 3:15si j'ai les cheveux lisses ou crépus.
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3:15 - 3:17Ou si je préfère Star Trek
ou Star Wars. -
3:18 - 3:22Pourquoi toujours vouloir à tout prix
distinguer les hommes et les femmes -
3:22 - 3:23dans les formulaires ?
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3:25 - 3:26Eh oui, je sais.
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3:26 - 3:27Sans doute,
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3:27 - 3:29dans un bureau, au marketing,
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3:29 - 3:31y a quelqu'un qui essaie de nous vendre
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3:31 - 3:32des produits essentiels
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3:33 - 3:34comme du dentifrice pour homme
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3:34 - 3:36ou des stylos à bille pour femme.
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3:37 - 3:39Non mais, ça existe,
ça existe vraiment. -
3:40 - 3:42Vous me direz, alors
homme/femme, -
3:42 - 3:43c'est quand même la base.
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3:43 - 3:45La société fonctionne comme ça.
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3:45 - 3:48Tiens, d'ailleurs, on a tous
un numéro de sécurité sociale -
3:48 - 3:51qui commence par 1
ou par 2, n'est-ce pas ? -
3:51 - 3:53Saviez-vous qu'il y a
des numéros provisoires -
3:53 - 3:55en 7 et en 8 ?
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3:55 - 3:57Et avant il y avait des 3, des 4,
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3:57 - 3:58des 5, des 6 ?
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3:59 - 4:01Ça date de Vichy.
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4:01 - 4:043 et 4 étaient pour les Algériens
et les Colonisés, -
4:04 - 4:065 et 6 pour les Juifs français.
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4:07 - 4:10Eh oui, classer les gens
ne coule pas de source. -
4:11 - 4:13Ça se choisit.
C'est politique. -
4:14 - 4:17D'ailleurs, entre le 1 et le 2,
ce ne sont pas les femmes -
4:17 - 4:18qui ont eu le 1.
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4:19 - 4:22Oui, mais le 1 et le 2
sur la Carte Vitale, -
4:22 - 4:24c'est important
pour envoyer aux femmes -
4:24 - 4:28des invitations au dépistage
du cancer du col de l'utérus, -
4:28 - 4:29n'est-ce pas ?
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4:29 - 4:35Mais veut-on vraiment envoyer
ces invitations aux femmes -
4:35 - 4:37ou aux personnes
qui ont un utérus ? -
4:38 - 4:40Certaines femmes n'ont pas
ou plus d'utérus. -
4:40 - 4:42Certaines personnes
ne sont pas des femmes -
4:42 - 4:43et ont un utérus.
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4:44 - 4:47Pour nos invitations de dépistage,
on n'est pas sorti de l'auberge. -
4:47 - 4:49Oui, mais la réalité est complexe.
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4:50 - 4:53Plaquer un modèle binaire dessus
n'efface pas cette complexité, -
4:53 - 4:54ça la masque seulement.
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4:55 - 4:57Alors, ce système de 1 et de 2,
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4:57 - 4:59devons-nous le prendre comme un outil
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4:59 - 5:01ou comme une règle immuable ?
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5:02 - 5:03Moi, ça m'arrangerait
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5:03 - 5:04que ce soit pas immuable
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5:04 - 5:06parce que mon numéro
de sécurité sociale, -
5:06 - 5:08il commence par un 2.
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5:09 - 5:10Reprenons depuis le début.
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5:11 - 5:13Avant même ma naissance,
mes parents ont été confrontés -
5:13 - 5:15à LA question :
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5:15 - 5:17« Alors, vous attendez quoi ? »
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5:18 - 5:19« Eh ben, un bébé, pardi !
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5:20 - 5:21C'est pas un raptor. »
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5:22 - 5:24Bien sûr, la question sous-entend :
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5:24 - 5:26est-ce que ce sera un bébé mâle
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5:26 - 5:27ou un bébé femelle ?
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5:29 - 5:30Ça nous apporte quoi
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5:30 - 5:32de toujours vouloir poser cette question ?
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5:32 - 5:33Qu'est-ce que ça va changer
-
5:33 - 5:35dans notre comportement
face à ce fœtus -
5:35 - 5:36ou ce nouveau-né ?
-
5:37 - 5:39C'est pour choisir
le cadeau de naissance : -
5:39 - 5:41un tube de dentifrice
pour homme -
5:41 - 5:42ou un stylo à bille pour femme ?
-
5:43 - 5:45Donc, en gros,
je n'étais pas encore né -
5:45 - 5:47mais les gens
se faisaient déjà -
5:47 - 5:49des tonnes de projections sur moi.
-
5:49 - 5:52À ma naissance, un médecin
a examiné mon entrejambe -
5:52 - 5:53et a déclaré :
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5:53 - 5:54« C'est une femelle. »
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5:54 - 5:56Pas besoin d'être
médecin pour ça. -
5:56 - 6:00Pourtant, personne n'a songé à analyser
les chromosomes sexuels -
6:00 - 6:03XX, XY ou une autre formule.
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6:04 - 6:07Personne n'a non plus étudié
mes organes internes : -
6:07 - 6:11des ovaires - combien,
des testicules internes, un utérus. -
6:11 - 6:12Personne ne s'est dit :
-
6:12 - 6:14« Tiens, cet enfant,
il faut qu'on mesure -
6:15 - 6:17ses taux hormonaux
tout au long de sa croissance. » -
6:17 - 6:20En fait, le sexe est déterminé
par une foule de critères, -
6:20 - 6:23et pourtant, à ma naissance,
en un coup d’œil, -
6:24 - 6:25un médecin a déclaré :
-
6:25 - 6:26« C'est une femelle ! »
-
6:26 - 6:30Coup d’œil du professionnel.
100% sûr. Zéro doute. -
6:31 - 6:34En fait, mes organes génitaux externes
rentraient tout simplement -
6:34 - 6:37dans les normes
que la médecine a fixées. -
6:37 - 6:41Parce que ces normes
ont été fixées par des gens. -
6:41 - 6:45C'est quoi, la taille réglementaire
d'un pénis ou d'un clitoris ? -
6:45 - 6:48C'est quoi, une vulve normale ?
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6:48 - 6:52La nature, elle ne s'embête pas
à lire les manuels de médecine. -
6:52 - 6:53Bien plus simple,
-
6:53 - 6:54des gens naissent
-
6:54 - 6:56avec des organes génitaux externes
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6:56 - 6:57qui ne rentrent pas
-
6:57 - 6:59dans les normes
que la médecine a fixées. -
6:59 - 7:00Ce sont des personnes intersexes.
-
7:01 - 7:03Alors, on fait quoi de ces personnes-là ?
-
7:04 - 7:06On les met dans laquelle
de nos deux cases ? -
7:06 - 7:11En France, on a la solution :
l'habitude est d'opérer ces nouveaux-nés -
7:11 - 7:14qui n'ont rien demandé
pour les « réparer » chirurgicalement. -
7:14 - 7:18En fait, les rendre conformes
à la case qu'on a choisie à leur place. -
7:19 - 7:21Donc, oui, en France des médecins blancs
-
7:21 - 7:24pratiquent aussi des excisions
en toute légalité. -
7:25 - 7:29Je ne ne sais pas pour vous,
mais moi, un système avec des cases -
7:30 - 7:33quand ça amène à mutiler les enfants,
ça me pose question. -
7:34 - 7:35Pas vous ?
-
7:36 - 7:38En fait,
je me suis retrouvé étiqueté -
7:38 - 7:43à la naissance :
« femelle ». 100%, zéro doute. -
7:43 - 7:47Et là, y a eu un raccourci
mais complètement délirant : -
7:47 - 7:51les gens ont commencé
à raconter que j'étais une fille. -
7:51 - 7:54Oui, oui. D’où ils ont imaginé ça,
j'en sais rien. -
7:55 - 7:58Vous étiez à la réunion
où c'était décidé hein ? -
7:58 - 7:59Moi, j'ai pas été invité.
-
7:59 - 8:03Du coup, j'aimerais, au moins,
récupérer les documents de travail. -
8:03 - 8:05Oui...
Tant pis, voilà. -
8:05 - 8:08Du coup, la rumeur s'est répandue
que j'étais une fille -
8:08 - 8:11comme je savais pas encore parler,
- je venais de naître - -
8:11 - 8:12impossible de démentir.
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8:12 - 8:15Donc, mes parents ont vraiment cru
que j'étais une fille. -
8:15 - 8:19Ils m'ont collé un prénom de fille.
Le résultat : on m'a créé -
8:19 - 8:22une identité administrative féminine.
Un « F » sur ma carte d’identité, -
8:22 - 8:25un « 2 » à la Sécu.
Voilà, tamponné, merci. -
8:26 - 8:29Vers mes 3 ans, j'ai découvert
la grosse bourde qui a été faite, -
8:29 - 8:32j'ai trop osé rien dire, parce que
quand même ça me semblait -
8:32 - 8:36mais hallucinant que tous ces adultes
aient pu se tromper comme ça. -
8:36 - 8:40Quand même, les adultes sont des gens
qui savent compter jusqu'à plus que 1000. -
8:42 - 8:46Bien plus tard, j'ai découvert
que d'autres personnes avaient subi -
8:46 - 8:48les mêmes erreurs de la part
d'autres adultes -
8:48 - 8:50qui savaient aussi compter
jusqu'à plus que 1000, -
8:50 - 8:54et qu'en Europe, il semblerait
que la plupart des adultes considèrent -
8:54 - 8:59qu'une fille est forcement une femelle
et donc un garçon est forcément un mâle. -
8:59 - 9:03Alors, oui, la plupart du temps,
ça marche. -
9:03 - 9:05Ça marche pour les gens
qu'on dit « cisgenre ». -
9:05 - 9:09Leur genre - homme, femme - correspond
à quoi on s'attend d'après leur sexe, -
9:09 - 9:10mâle, femelle.
-
9:11 - 9:14Statistiquement,
c'est un bon nombre d'entre vous. -
9:14 - 9:16Vous pourrez rentrer à la maison
-
9:16 - 9:19en sachant enfin que vous êtes
une personne cisgenre. -
9:19 - 9:22Et puis, y a des personnes
pour qui ce raisonnement automatique - -
9:22 - 9:25mâle = garçon, femelle = fille -
ne fonctionne pas. -
9:25 - 9:27Ce sont des personnes transgenres.
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9:27 - 9:30C'est mon cas.
Et on est plein. -
9:30 - 9:34Et on est partout.
Et non, on n'est pas contagieux. -
9:36 - 9:40Être une personne transgenre m'offre
un atout considérable dans la vie, -
9:41 - 9:45celui de subir des questions indiscrètes
de la part de n'importe qui -
9:45 - 9:46à n'importe quel moment.
-
9:47 - 9:51Moi, j'aimerais plutôt que les gens
appliquent une règle toute simple -
9:51 - 9:53que j'ai appelée
« la règle de la boulangerie ». -
9:53 - 9:55Tu veux me poser une question.
-
9:55 - 9:56Est-ce que ce serait déplacé
-
9:56 - 9:58de faire de même dans une boulangerie ?
-
9:58 - 10:00Si oui, tu t'abstiens.
-
10:00 - 10:03Exemple. Une question
sur mes organes génitaux. -
10:03 - 10:08« Oui, bonjour, je voudrais une baguette
et aussi savoir si vous avez un vagin ? » -
10:08 - 10:12Bof, bof. Donc, tu t'abstiens.
-
10:12 - 10:15Et non, tu ne peux pas non plus
me palper pour satisfaire tes curiosités. -
10:16 - 10:19Autre aspect cocasse de ma vie
de personne transgenre - -
10:19 - 10:23mes papiers d'identité
ne traduisent pas mon identité. -
10:23 - 10:27Si je veux les changer, actuellement
en France, changer le F en M, -
10:27 - 10:30changer mon prénom de naissance
par mon vrai prénom Antonin, -
10:30 - 10:33je dois attaquer l’État
dans un Tribunal de Grande Instance, -
10:33 - 10:37où la plupart des juges vont me demander
un papier de psychiatre -
10:37 - 10:39attestant que je souffre
d'une maladie mentale, -
10:40 - 10:43oui, comme on faisait avant
avec l’homosexualité, -
10:43 - 10:45et la preuve que j'ai été stérilisé.
-
10:45 - 10:48Oui, comme on fait avec les animaux
chez le vétérinaire. -
10:49 - 10:51Et donc, à cause de ces papiers,
-
10:51 - 10:54ma vie quotidienne est
pleine de petites complications, -
10:54 - 10:57comme, par exemple, recevoir
mon courrier à deux prénoms différents. -
10:57 - 11:00Sur ma boîte aux lettres, je n'ai mis
que mon nom de famille. -
11:00 - 11:02Si je mets mes deux prénoms, bon...
-
11:02 - 11:05Dans mon immeuble, ils vont
assez vite comprendre -
11:05 - 11:07que je ne vis pas avec ma sœur...
Voilà. -
11:07 - 11:10Question respect de la vie privée, moyen.
-
11:10 - 11:14Au téléphone, je me retrouve aussi
régulièrement à devoir jouer le rôle -
11:14 - 11:16de ma propre épouse
ou mon propre fils, -
11:16 - 11:19c'est un peu perturbant.
-
11:20 - 11:23Mais bien trop souvent,
cette incongruité administrative -
11:24 - 11:27est beaucoup plus dure à vivre.
-
11:27 - 11:28C'est quand je paie par chèque,
-
11:29 - 11:31et qu'on m'accuse
d'avoir volé le chéquier. -
11:31 - 11:32C'est au bureau de vote,
-
11:32 - 11:35quand les assesseurs crient
mon prénom de naissance, -
11:35 - 11:38et plusieurs paires d'yeux
me dévisagent avec suspicion. -
11:38 - 11:41Pour ne plus vivre ça, je connais
trop de personnes transgenres -
11:41 - 11:43qui ont arrêté d'aller voter.
-
11:43 - 11:45C'est aussi quand le contrôleur
-
11:45 - 11:47m'accuse à voix haute d'avoir fraudé,
-
11:47 - 11:50me tutoie,
lis ma carte d'identité à tout le wagon. -
11:50 - 11:53Que je bafouille des explications
honteuses et qu'ensuite, -
11:53 - 11:55j'ai peur pour ma sécurité
-
11:55 - 11:57parce qu'un mec
m'a regardé méchamment. -
11:58 - 12:01Et j'ai trop d'amis à qui on a cassé
la gueule pour ne pas y penser. -
12:02 - 12:03C'est chaque guichet.
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12:04 - 12:06Chaque papier administratif
à fournir. -
12:07 - 12:09Et puis,
-
12:09 - 12:11c'est aussi
quand les étudiants de médecine -
12:12 - 12:14apprennent encore aujourd'hui que,
-
12:14 - 12:15comme toutes les transgenres,
-
12:15 - 12:16je suis un malade mental,
-
12:16 - 12:18et on n'écoute pas
ces gens-là. -
12:18 - 12:20On les stérilise plutôt.
-
12:21 - 12:22Finalement...
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12:23 - 12:26Finalement, tout ça parce que
des adultes -
12:26 - 12:29qui savent compter
jusqu'à plus que 1000 -
12:30 - 12:32sont enfermés dans des schémas rigides,
-
12:32 - 12:35qu'ils ont fait une supposition
concernant mon identité -
12:35 - 12:36sans me demander mon avis,
-
12:37 - 12:39et qu'ils se sont trompés.
-
12:41 - 12:45Alors, et si on arrêtait d'avoir peur
de bouger les normes ? -
12:45 - 12:48Et si on s'offrait de la liberté ?
-
12:48 - 12:51Les premières barrières, ce sont celles
que l'on se met tout seul. -
12:51 - 12:55Ton fiston, il risque quoi
si tu lui offres une poupée ? -
12:55 - 12:57De devenir un bon papa ?
-
12:57 - 13:00Alors, bougeons nos codes !
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13:00 - 13:03(Applaudissements)
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13:04 - 13:06Bougeons nos codes,
et littéralement, -
13:06 - 13:08pour mes confrères et consœurs
informaticiens, -
13:08 - 13:10le code de vos logiciels,
-
13:10 - 13:13vous avez un grand pouvoir
de simplification de ma vie. -
13:13 - 13:16Et un grand pouvoir implique
de grandes responsabilités. -
13:16 - 13:19(Applaudissements)
-
13:25 - 13:27De quoi avons-nous peur ?
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13:28 - 13:31Repensons nos habitudes,
nos automatismes ! -
13:31 - 13:33Remettons en question le système !
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13:33 - 13:36Sortons de nos carcans !
-
13:36 - 13:39On simplifiera, mais grandement,
la vie de toutes les personnes -
13:39 - 13:42qui ne rentrent pas dans le cadre binaire
du sexe et du genre. -
13:42 - 13:46Bien sûr, on facilitera aussi
la vie de tout le monde. -
13:46 - 13:50Faisons-le pour moi, pour vous-même,
pour les membres de notre famille, -
13:50 - 13:52pour nos amis, nos collègues.
-
13:52 - 13:56Mais alors, quelle chance extraordinaire
-
13:56 - 13:57on pourrait s'offrir :
-
13:57 - 14:01la chance de rencontrer
toute la diversité -
14:01 - 14:03de ces identités hors normes,
-
14:03 - 14:07toutes ces énergies qui ne demandent
qu'à s'épanouir autour de nous. -
14:08 - 14:10Si on sait vraiment compter
jusqu'à plus que 1000, -
14:10 - 14:13envisagez qu'il existe
plus de deux cases. -
14:13 - 14:14Je nous fais confiance,
-
14:14 - 14:17je sais que c'est à notre portée.
-
14:17 - 14:17Merci !
-
14:17 - 14:20(Applaudissements)
- Title:
- La binarité, c'est pas mon genre | Antonin Le Mée | TEDxRennes
- Description:
-
Cette présentation a été faite lors d'un événement TEDx local, produit indépendamment des conférences TED.
Puisant dans son expérience auprès d'associations LGBTI (Lesbiennes Gays Bisexuelles Transgenres Intersexes) ainsi que dans sa propre vie, Antonin Le Mée explique comment la société occidentale est structurée par des cases binaires liées au sexe et au genre. Que ce soit dans les comportements attendus ou les systèmes administratifs, partout on classe en deux catégories étanches : mâle / femelle, homme / femme, monsieur / madame...
Pourtant, la réalité des personnes est bien plus riche que cette binarité. Il existe une diversité incroyable de corps, d'identités, de comportements. Que se passe-t-il alors pour les gens qui ne rentrent pas dans les normes binaires ? Avoir une apparence androgyne, être intersexe ou transgenre sont par exemple encore trop souvent synonymes de difficultés inacceptables dans la société, allant de la remarque déplacée à la mutilation génitale. Alors pourquoi séparer, trier, étiqueter à tout prix ? Et si nous apprenions à compter au delà de 2 ?Né à Saint-Brieuc, c'est en grandissant entre trois cultures (française, bretonne et indochinoise) qu’Antonin a compris très jeune que la diversité était une richesse, mais qu'il était parfois bien difficile de faire respecter son individualité. Heureusement, l'exemple de sa famille aux nombreux engagements sociaux et militants lui a montré que nous pouvions tou·te·s agir pour un monde plus juste et plus raisonné. Courant 2009, il a franchis la porte du Centre Gay Lesbien Bi et Trans de Rennes (CGLBT), y devient bénévole et, touche-à-tout, y prend des responsabilités au fil des années.
En 2015, il quitte la présidence pour faciliter son engagement auprès de la Fédération LGBT Nationale dont il est actuellement porte-parole. Des actions de terrain en Bretagne au travail avec les élu·e·s, Antonin est confronté à des publics très variés dans des domaines tels que la lutte contre les discriminations, la promotion de la santé, l'accompagnement individuel ou l'éducation populaire. - Video Language:
- French
- Team:
- closed TED
- Project:
- TEDxTalks
- Duration:
- 14:25
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