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La binarité, c'est pas mon genre | Antonin Le Mée | TEDxRennes

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    Messieurs, bonjour.
  • 0:17 - 0:19
    Je ne dis pas « mesdames ».
    C'est un gain de temps.
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    Et messieurs,
    ça fait plus professionnel.
  • 0:22 - 0:23
    En plus, si on dit « mesdames »,
  • 0:24 - 0:26
    est-ce qu'on doit dire
    « mesdemoiselles » ?
  • 0:26 - 0:27
    Y a des femmes là
  • 0:27 - 0:29
    qui ne sont pas mariées ?
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    C'est important que je le sache.
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    Des hommes non mariés.
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    Non, ça n'a aucune importance.
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    En plus, bon, mesdemoiseaux,
    ça fait un peu vieux jeu, non ?
  • 0:38 - 0:39
    Donc, je dis juste :
  • 0:39 - 0:40
    bonjour, messieurs.
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    Et c'est très bien comme ça.
  • 0:42 - 0:44
    Non ? Hum.
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    Pourquoi pas...
    Gauchers, droitiers, bonjour.
  • 0:48 - 0:51
    Je classe aussi des gens en 2 catégories.
    Ça paraît bien, non ?
  • 0:52 - 0:54
    Ah, mince ! Les ambidextres.
  • 0:54 - 0:55
    Ou alors ...
  • 0:55 - 0:57
    Juste ...
  • 0:57 - 0:59
    Bonjour.
  • 0:59 - 1:02
    Est-ce vraiment capital de souligner
    le genre des personnes qu'on salue ?
  • 1:02 - 1:03
    Pourquoi notre éducation
  • 1:03 - 1:05
    nous a appris que c'est plus poli ?
  • 1:05 - 1:07
    Bonjour, monsieur.
    Bonjour, madame.
  • 1:08 - 1:09
    C'est un automatisme.
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    On le dit comme ça.
  • 1:10 - 1:11
    Sans réfléchir.
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    C'est marrant parce que moi,
    quand j'entre dans un commerce,
  • 1:15 - 1:17
    les gens sont obligés de réfléchir.
  • 1:17 - 1:20
    Avec mon apparence, beaucoup de gens
    se retrouvent en difficulté,
  • 1:21 - 1:23
    et donc j'ai régulièrement
    le droit à des :
  • 1:23 - 1:26
    « Bonjour, mons... mada ... mons... »
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    « Bonjour, mon petit bonhomme. »
  • 1:29 - 1:32
    Voire, « bonjour, messieurs-dames »,
    quand je suis tout seul.
  • 1:33 - 1:37
    Rappel : j'ai 28 ans
    et je suis une seule personne.
  • 1:37 - 1:40
    Cette hésitation
    quand on me dit bonjour
  • 1:40 - 1:43
    est toujours accompagnée
    d'un malaise palpable
  • 1:43 - 1:44
    chez la personne en face de moi :
  • 1:44 - 1:46
    elle attend une réponse.
  • 1:46 - 1:49
    Ça semble indispensable
    pour la suite de notre interaction.
  • 1:49 - 1:51
    Monsieur ou madame.
  • 1:51 - 1:52
    Homme ou femme.
  • 1:53 - 1:54
    La réponse ?
  • 1:54 - 1:56
    Pour moi, c'est monsieur.
  • 1:56 - 1:58
    Mais ce n'est ni homme ni femme.
  • 1:59 - 2:00
    Je m'explique.
  • 2:00 - 2:03
    Monsieur est l'interface sociale
    que j'utilise.
  • 2:03 - 2:05
    Ça traduit l'expression de mon genre.
  • 2:05 - 2:08
    J'ai un prénom masculin.
    On parle de moi au masculin.
  • 2:08 - 2:11
    Exemple :
    Antonin, il est petit mais costaud.
  • 2:12 - 2:14
    En revanche, on me pose souvent
    la question :
  • 2:14 - 2:17
    « Mais tu es un homme ou une femme ? »
  • 2:18 - 2:20
    Eh bien, la meilleure réponse
    que j'ai trouvée,
  • 2:20 - 2:22
    c'est « Non ».
  • 2:23 - 2:26
    Mon identité de genre
    se situe en dehors de ces deux cases :
  • 2:26 - 2:27
    homme/femme.
  • 2:27 - 2:29
    On dit que mon genre
    est non-binaire.
  • 2:30 - 2:32
    Ce qui, somme toute,
    est assez amusant :
  • 2:32 - 2:33
    je suis informaticien,
  • 2:33 - 2:35
    le binaire
    ne me fait pourtant pas peur.
  • 2:36 - 2:39
    Mais la société occidentale
    aime la binarité.
  • 2:39 - 2:41
    Ça la rassure.
  • 2:41 - 2:45
    Alors, bien souvent, elle me force
    à choisir soit homme, soit femme.
  • 2:46 - 2:48
    Dans les formulaires
    à la question « sexe »,
  • 2:48 - 2:51
    quand je peux, je ne coche
    aucune des deux cases
  • 2:51 - 2:52
    ou bien je coche les deux.
  • 2:52 - 2:53
    Le petit malin
  • 2:53 - 2:56
    qui fait ça dans les sondages,
    c'est moi.
  • 2:56 - 2:58
    Et puis, quand j'ai
    vraiment pas le choix,
  • 2:58 - 2:59
    je coche « homme »,
  • 3:00 - 3:02
    c'est ce qui est
    plus proche de mon identité.
  • 3:03 - 3:07
    Pourquoi on veut savoir
    si je suis un homme
  • 3:07 - 3:09
    quand on étudie
    ma consommation de café
  • 3:10 - 3:10
    ou quand je fais
  • 3:10 - 3:12
    ma carte de bibliothèque ?
  • 3:12 - 3:13
    On ne me demande pas
  • 3:13 - 3:15
    si j'ai les cheveux lisses ou crépus.
  • 3:15 - 3:17
    Ou si je préfère Star Trek
    ou Star Wars.
  • 3:18 - 3:22
    Pourquoi toujours vouloir à tout prix
    distinguer les hommes et les femmes
  • 3:22 - 3:23
    dans les formulaires ?
  • 3:25 - 3:26
    Eh oui, je sais.
  • 3:26 - 3:27
    Sans doute,
  • 3:27 - 3:29
    dans un bureau, au marketing,
  • 3:29 - 3:31
    y a quelqu'un qui essaie de nous vendre
  • 3:31 - 3:32
    des produits essentiels
  • 3:33 - 3:34
    comme du dentifrice pour homme
  • 3:34 - 3:36
    ou des stylos à bille pour femme.
  • 3:37 - 3:39
    Non mais, ça existe,
    ça existe vraiment.
  • 3:40 - 3:42
    Vous me direz, alors
    homme/femme,
  • 3:42 - 3:43
    c'est quand même la base.
  • 3:43 - 3:45
    La société fonctionne comme ça.
  • 3:45 - 3:48
    Tiens, d'ailleurs, on a tous
    un numéro de sécurité sociale
  • 3:48 - 3:51
    qui commence par 1
    ou par 2, n'est-ce pas ?
  • 3:51 - 3:53
    Saviez-vous qu'il y a
    des numéros provisoires
  • 3:53 - 3:55
    en 7 et en 8 ?
  • 3:55 - 3:57
    Et avant il y avait des 3, des 4,
  • 3:57 - 3:58
    des 5, des 6 ?
  • 3:59 - 4:01
    Ça date de Vichy.
  • 4:01 - 4:04
    3 et 4 étaient pour les Algériens
    et les Colonisés,
  • 4:04 - 4:06
    5 et 6 pour les Juifs français.
  • 4:07 - 4:10
    Eh oui, classer les gens
    ne coule pas de source.
  • 4:11 - 4:13
    Ça se choisit.
    C'est politique.
  • 4:14 - 4:17
    D'ailleurs, entre le 1 et le 2,
    ce ne sont pas les femmes
  • 4:17 - 4:18
    qui ont eu le 1.
  • 4:19 - 4:22
    Oui, mais le 1 et le 2
    sur la Carte Vitale,
  • 4:22 - 4:24
    c'est important
    pour envoyer aux femmes
  • 4:24 - 4:28
    des invitations au dépistage
    du cancer du col de l'utérus,
  • 4:28 - 4:29
    n'est-ce pas ?
  • 4:29 - 4:35
    Mais veut-on vraiment envoyer
    ces invitations aux femmes
  • 4:35 - 4:37
    ou aux personnes
    qui ont un utérus ?
  • 4:38 - 4:40
    Certaines femmes n'ont pas
    ou plus d'utérus.
  • 4:40 - 4:42
    Certaines personnes
    ne sont pas des femmes
  • 4:42 - 4:43
    et ont un utérus.
  • 4:44 - 4:47
    Pour nos invitations de dépistage,
    on n'est pas sorti de l'auberge.
  • 4:47 - 4:49
    Oui, mais la réalité est complexe.
  • 4:50 - 4:53
    Plaquer un modèle binaire dessus
    n'efface pas cette complexité,
  • 4:53 - 4:54
    ça la masque seulement.
  • 4:55 - 4:57
    Alors, ce système de 1 et de 2,
  • 4:57 - 4:59
    devons-nous le prendre comme un outil
  • 4:59 - 5:01
    ou comme une règle immuable ?
  • 5:02 - 5:03
    Moi, ça m'arrangerait
  • 5:03 - 5:04
    que ce soit pas immuable
  • 5:04 - 5:06
    parce que mon numéro
    de sécurité sociale,
  • 5:06 - 5:08
    il commence par un 2.
  • 5:09 - 5:10
    Reprenons depuis le début.
  • 5:11 - 5:13
    Avant même ma naissance,
    mes parents ont été confrontés
  • 5:13 - 5:15
    à LA question :
  • 5:15 - 5:17
    « Alors, vous attendez quoi ? »
  • 5:18 - 5:19
    « Eh ben, un bébé, pardi !
  • 5:20 - 5:21
    C'est pas un raptor. »
  • 5:22 - 5:24
    Bien sûr, la question sous-entend :
  • 5:24 - 5:26
    est-ce que ce sera un bébé mâle
  • 5:26 - 5:27
    ou un bébé femelle ?
  • 5:29 - 5:30
    Ça nous apporte quoi
  • 5:30 - 5:32
    de toujours vouloir poser cette question ?
  • 5:32 - 5:33
    Qu'est-ce que ça va changer
  • 5:33 - 5:35
    dans notre comportement
    face à ce fœtus
  • 5:35 - 5:36
    ou ce nouveau-né ?
  • 5:37 - 5:39
    C'est pour choisir
    le cadeau de naissance :
  • 5:39 - 5:41
    un tube de dentifrice
    pour homme
  • 5:41 - 5:42
    ou un stylo à bille pour femme ?
  • 5:43 - 5:45
    Donc, en gros,
    je n'étais pas encore né
  • 5:45 - 5:47
    mais les gens
    se faisaient déjà
  • 5:47 - 5:49
    des tonnes de projections sur moi.
  • 5:49 - 5:52
    À ma naissance, un médecin
    a examiné mon entrejambe
  • 5:52 - 5:53
    et a déclaré :
  • 5:53 - 5:54
    « C'est une femelle. »
  • 5:54 - 5:56
    Pas besoin d'être
    médecin pour ça.
  • 5:56 - 6:00
    Pourtant, personne n'a songé à analyser
    les chromosomes sexuels
  • 6:00 - 6:03
    XX, XY ou une autre formule.
  • 6:04 - 6:07
    Personne n'a non plus étudié
    mes organes internes :
  • 6:07 - 6:11
    des ovaires - combien,
    des testicules internes, un utérus.
  • 6:11 - 6:12
    Personne ne s'est dit :
  • 6:12 - 6:14
    « Tiens, cet enfant,
    il faut qu'on mesure
  • 6:15 - 6:17
    ses taux hormonaux
    tout au long de sa croissance. »
  • 6:17 - 6:20
    En fait, le sexe est déterminé
    par une foule de critères,
  • 6:20 - 6:23
    et pourtant, à ma naissance,
    en un coup d’œil,
  • 6:24 - 6:25
    un médecin a déclaré :
  • 6:25 - 6:26
    « C'est une femelle ! »
  • 6:26 - 6:30
    Coup d’œil du professionnel.
    100% sûr. Zéro doute.
  • 6:31 - 6:34
    En fait, mes organes génitaux externes
    rentraient tout simplement
  • 6:34 - 6:37
    dans les normes
    que la médecine a fixées.
  • 6:37 - 6:41
    Parce que ces normes
    ont été fixées par des gens.
  • 6:41 - 6:45
    C'est quoi, la taille réglementaire
    d'un pénis ou d'un clitoris ?
  • 6:45 - 6:48
    C'est quoi, une vulve normale ?
  • 6:48 - 6:52
    La nature, elle ne s'embête pas
    à lire les manuels de médecine.
  • 6:52 - 6:53
    Bien plus simple,
  • 6:53 - 6:54
    des gens naissent
  • 6:54 - 6:56
    avec des organes génitaux externes
  • 6:56 - 6:57
    qui ne rentrent pas
  • 6:57 - 6:59
    dans les normes
    que la médecine a fixées.
  • 6:59 - 7:00
    Ce sont des personnes intersexes.
  • 7:01 - 7:03
    Alors, on fait quoi de ces personnes-là ?
  • 7:04 - 7:06
    On les met dans laquelle
    de nos deux cases ?
  • 7:06 - 7:11
    En France, on a la solution :
    l'habitude est d'opérer ces nouveaux-nés
  • 7:11 - 7:14
    qui n'ont rien demandé
    pour les « réparer » chirurgicalement.
  • 7:14 - 7:18
    En fait, les rendre conformes
    à la case qu'on a choisie à leur place.
  • 7:19 - 7:21
    Donc, oui, en France des médecins blancs
  • 7:21 - 7:24
    pratiquent aussi des excisions
    en toute légalité.
  • 7:25 - 7:29
    Je ne ne sais pas pour vous,
    mais moi, un système avec des cases
  • 7:30 - 7:33
    quand ça amène à mutiler les enfants,
    ça me pose question.
  • 7:34 - 7:35
    Pas vous ?
  • 7:36 - 7:38
    En fait,
    je me suis retrouvé étiqueté
  • 7:38 - 7:43
    à la naissance :
    « femelle ». 100%, zéro doute.
  • 7:43 - 7:47
    Et là, y a eu un raccourci
    mais complètement délirant :
  • 7:47 - 7:51
    les gens ont commencé
    à raconter que j'étais une fille.
  • 7:51 - 7:54
    Oui, oui. D’où ils ont imaginé ça,
    j'en sais rien.
  • 7:55 - 7:58
    Vous étiez à la réunion
    où c'était décidé hein ?
  • 7:58 - 7:59
    Moi, j'ai pas été invité.
  • 7:59 - 8:03
    Du coup, j'aimerais, au moins,
    récupérer les documents de travail.
  • 8:03 - 8:05
    Oui...
    Tant pis, voilà.
  • 8:05 - 8:08
    Du coup, la rumeur s'est répandue
    que j'étais une fille
  • 8:08 - 8:11
    comme je savais pas encore parler,
    - je venais de naître -
  • 8:11 - 8:12
    impossible de démentir.
  • 8:12 - 8:15
    Donc, mes parents ont vraiment cru
    que j'étais une fille.
  • 8:15 - 8:19
    Ils m'ont collé un prénom de fille.
    Le résultat : on m'a créé
  • 8:19 - 8:22
    une identité administrative féminine.
    Un « F » sur ma carte d’identité,
  • 8:22 - 8:25
    un « 2 » à la Sécu.
    Voilà, tamponné, merci.
  • 8:26 - 8:29
    Vers mes 3 ans, j'ai découvert
    la grosse bourde qui a été faite,
  • 8:29 - 8:32
    j'ai trop osé rien dire, parce que
    quand même ça me semblait
  • 8:32 - 8:36
    mais hallucinant que tous ces adultes
    aient pu se tromper comme ça.
  • 8:36 - 8:40
    Quand même, les adultes sont des gens
    qui savent compter jusqu'à plus que 1000.
  • 8:42 - 8:46
    Bien plus tard, j'ai découvert
    que d'autres personnes avaient subi
  • 8:46 - 8:48
    les mêmes erreurs de la part
    d'autres adultes
  • 8:48 - 8:50
    qui savaient aussi compter
    jusqu'à plus que 1000,
  • 8:50 - 8:54
    et qu'en Europe, il semblerait
    que la plupart des adultes considèrent
  • 8:54 - 8:59
    qu'une fille est forcement une femelle
    et donc un garçon est forcément un mâle.
  • 8:59 - 9:03
    Alors, oui, la plupart du temps,
    ça marche.
  • 9:03 - 9:05
    Ça marche pour les gens
    qu'on dit « cisgenre ».
  • 9:05 - 9:09
    Leur genre - homme, femme - correspond
    à quoi on s'attend d'après leur sexe,
  • 9:09 - 9:10
    mâle, femelle.
  • 9:11 - 9:14
    Statistiquement,
    c'est un bon nombre d'entre vous.
  • 9:14 - 9:16
    Vous pourrez rentrer à la maison
  • 9:16 - 9:19
    en sachant enfin que vous êtes
    une personne cisgenre.
  • 9:19 - 9:22
    Et puis, y a des personnes
    pour qui ce raisonnement automatique -
  • 9:22 - 9:25
    mâle = garçon, femelle = fille -
    ne fonctionne pas.
  • 9:25 - 9:27
    Ce sont des personnes transgenres.
  • 9:27 - 9:30
    C'est mon cas.
    Et on est plein.
  • 9:30 - 9:34
    Et on est partout.
    Et non, on n'est pas contagieux.
  • 9:36 - 9:40
    Être une personne transgenre m'offre
    un atout considérable dans la vie,
  • 9:41 - 9:45
    celui de subir des questions indiscrètes
    de la part de n'importe qui
  • 9:45 - 9:46
    à n'importe quel moment.
  • 9:47 - 9:51
    Moi, j'aimerais plutôt que les gens
    appliquent une règle toute simple
  • 9:51 - 9:53
    que j'ai appelée
    « la règle de la boulangerie ».
  • 9:53 - 9:55
    Tu veux me poser une question.
  • 9:55 - 9:56
    Est-ce que ce serait déplacé
  • 9:56 - 9:58
    de faire de même dans une boulangerie ?
  • 9:58 - 10:00
    Si oui, tu t'abstiens.
  • 10:00 - 10:03
    Exemple. Une question
    sur mes organes génitaux.
  • 10:03 - 10:08
    « Oui, bonjour, je voudrais une baguette
    et aussi savoir si vous avez un vagin ? »
  • 10:08 - 10:12
    Bof, bof. Donc, tu t'abstiens.
  • 10:12 - 10:15
    Et non, tu ne peux pas non plus
    me palper pour satisfaire tes curiosités.
  • 10:16 - 10:19
    Autre aspect cocasse de ma vie
    de personne transgenre -
  • 10:19 - 10:23
    mes papiers d'identité
    ne traduisent pas mon identité.
  • 10:23 - 10:27
    Si je veux les changer, actuellement
    en France, changer le F en M,
  • 10:27 - 10:30
    changer mon prénom de naissance
    par mon vrai prénom Antonin,
  • 10:30 - 10:33
    je dois attaquer l’État
    dans un Tribunal de Grande Instance,
  • 10:33 - 10:37
    où la plupart des juges vont me demander
    un papier de psychiatre
  • 10:37 - 10:39
    attestant que je souffre
    d'une maladie mentale,
  • 10:40 - 10:43
    oui, comme on faisait avant
    avec l’homosexualité,
  • 10:43 - 10:45
    et la preuve que j'ai été stérilisé.
  • 10:45 - 10:48
    Oui, comme on fait avec les animaux
    chez le vétérinaire.
  • 10:49 - 10:51
    Et donc, à cause de ces papiers,
  • 10:51 - 10:54
    ma vie quotidienne est
    pleine de petites complications,
  • 10:54 - 10:57
    comme, par exemple, recevoir
    mon courrier à deux prénoms différents.
  • 10:57 - 11:00
    Sur ma boîte aux lettres, je n'ai mis
    que mon nom de famille.
  • 11:00 - 11:02
    Si je mets mes deux prénoms, bon...
  • 11:02 - 11:05
    Dans mon immeuble, ils vont
    assez vite comprendre
  • 11:05 - 11:07
    que je ne vis pas avec ma sœur...
    Voilà.
  • 11:07 - 11:10
    Question respect de la vie privée, moyen.
  • 11:10 - 11:14
    Au téléphone, je me retrouve aussi
    régulièrement à devoir jouer le rôle
  • 11:14 - 11:16
    de ma propre épouse
    ou mon propre fils,
  • 11:16 - 11:19
    c'est un peu perturbant.
  • 11:20 - 11:23
    Mais bien trop souvent,
    cette incongruité administrative
  • 11:24 - 11:27
    est beaucoup plus dure à vivre.
  • 11:27 - 11:28
    C'est quand je paie par chèque,
  • 11:29 - 11:31
    et qu'on m'accuse
    d'avoir volé le chéquier.
  • 11:31 - 11:32
    C'est au bureau de vote,
  • 11:32 - 11:35
    quand les assesseurs crient
    mon prénom de naissance,
  • 11:35 - 11:38
    et plusieurs paires d'yeux
    me dévisagent avec suspicion.
  • 11:38 - 11:41
    Pour ne plus vivre ça, je connais
    trop de personnes transgenres
  • 11:41 - 11:43
    qui ont arrêté d'aller voter.
  • 11:43 - 11:45
    C'est aussi quand le contrôleur
  • 11:45 - 11:47
    m'accuse à voix haute d'avoir fraudé,
  • 11:47 - 11:50
    me tutoie,
    lis ma carte d'identité à tout le wagon.
  • 11:50 - 11:53
    Que je bafouille des explications
    honteuses et qu'ensuite,
  • 11:53 - 11:55
    j'ai peur pour ma sécurité
  • 11:55 - 11:57
    parce qu'un mec
    m'a regardé méchamment.
  • 11:58 - 12:01
    Et j'ai trop d'amis à qui on a cassé
    la gueule pour ne pas y penser.
  • 12:02 - 12:03
    C'est chaque guichet.
  • 12:04 - 12:06
    Chaque papier administratif
    à fournir.
  • 12:07 - 12:09
    Et puis,
  • 12:09 - 12:11
    c'est aussi
    quand les étudiants de médecine
  • 12:12 - 12:14
    apprennent encore aujourd'hui que,
  • 12:14 - 12:15
    comme toutes les transgenres,
  • 12:15 - 12:16
    je suis un malade mental,
  • 12:16 - 12:18
    et on n'écoute pas
    ces gens-là.
  • 12:18 - 12:20
    On les stérilise plutôt.
  • 12:21 - 12:22
    Finalement...
  • 12:23 - 12:26
    Finalement, tout ça parce que
    des adultes
  • 12:26 - 12:29
    qui savent compter
    jusqu'à plus que 1000
  • 12:30 - 12:32
    sont enfermés dans des schémas rigides,
  • 12:32 - 12:35
    qu'ils ont fait une supposition
    concernant mon identité
  • 12:35 - 12:36
    sans me demander mon avis,
  • 12:37 - 12:39
    et qu'ils se sont trompés.
  • 12:41 - 12:45
    Alors, et si on arrêtait d'avoir peur
    de bouger les normes ?
  • 12:45 - 12:48
    Et si on s'offrait de la liberté ?
  • 12:48 - 12:51
    Les premières barrières, ce sont celles
    que l'on se met tout seul.
  • 12:51 - 12:55
    Ton fiston, il risque quoi
    si tu lui offres une poupée ?
  • 12:55 - 12:57
    De devenir un bon papa ?
  • 12:57 - 13:00
    Alors, bougeons nos codes !
  • 13:00 - 13:03
    (Applaudissements)
  • 13:04 - 13:06
    Bougeons nos codes,
    et littéralement,
  • 13:06 - 13:08
    pour mes confrères et consœurs
    informaticiens,
  • 13:08 - 13:10
    le code de vos logiciels,
  • 13:10 - 13:13
    vous avez un grand pouvoir
    de simplification de ma vie.
  • 13:13 - 13:16
    Et un grand pouvoir implique
    de grandes responsabilités.
  • 13:16 - 13:19
    (Applaudissements)
  • 13:25 - 13:27
    De quoi avons-nous peur ?
  • 13:28 - 13:31
    Repensons nos habitudes,
    nos automatismes !
  • 13:31 - 13:33
    Remettons en question le système !
  • 13:33 - 13:36
    Sortons de nos carcans !
  • 13:36 - 13:39
    On simplifiera, mais grandement,
    la vie de toutes les personnes
  • 13:39 - 13:42
    qui ne rentrent pas dans le cadre binaire
    du sexe et du genre.
  • 13:42 - 13:46
    Bien sûr, on facilitera aussi
    la vie de tout le monde.
  • 13:46 - 13:50
    Faisons-le pour moi, pour vous-même,
    pour les membres de notre famille,
  • 13:50 - 13:52
    pour nos amis, nos collègues.
  • 13:52 - 13:56
    Mais alors, quelle chance extraordinaire
  • 13:56 - 13:57
    on pourrait s'offrir :
  • 13:57 - 14:01
    la chance de rencontrer
    toute la diversité
  • 14:01 - 14:03
    de ces identités hors normes,
  • 14:03 - 14:07
    toutes ces énergies qui ne demandent
    qu'à s'épanouir autour de nous.
  • 14:08 - 14:10
    Si on sait vraiment compter
    jusqu'à plus que 1000,
  • 14:10 - 14:13
    envisagez qu'il existe
    plus de deux cases.
  • 14:13 - 14:14
    Je nous fais confiance,
  • 14:14 - 14:17
    je sais que c'est à notre portée.
  • 14:17 - 14:17
    Merci !
  • 14:17 - 14:20
    (Applaudissements)
Title:
La binarité, c'est pas mon genre | Antonin Le Mée | TEDxRennes
Description:

Cette présentation a été faite lors d'un événement TEDx local, produit indépendamment des conférences TED.

Puisant dans son expérience auprès d'associations LGBTI (Lesbiennes Gays Bisexuelles Transgenres Intersexes) ainsi que dans sa propre vie, Antonin Le Mée explique comment la société occidentale est structurée par des cases binaires liées au sexe et au genre. Que ce soit dans les comportements attendus ou les systèmes administratifs, partout on classe en deux catégories étanches : mâle / femelle, homme / femme, monsieur / madame...
Pourtant, la réalité des personnes est bien plus riche que cette binarité. Il existe une diversité incroyable de corps, d'identités, de comportements. Que se passe-t-il alors pour les gens qui ne rentrent pas dans les normes binaires ? Avoir une apparence androgyne, être intersexe ou transgenre sont par exemple encore trop souvent synonymes de difficultés inacceptables dans la société, allant de la remarque déplacée à la mutilation génitale. Alors pourquoi séparer, trier, étiqueter à tout prix ? Et si nous apprenions à compter au delà de 2 ?

Né à Saint-Brieuc, c'est en grandissant entre trois cultures (française, bretonne et indochinoise) qu’Antonin a compris très jeune que la diversité était une richesse, mais qu'il était parfois bien difficile de faire respecter son individualité. Heureusement, l'exemple de sa famille aux nombreux engagements sociaux et militants lui a montré que nous pouvions tou·te·s agir pour un monde plus juste et plus raisonné. Courant 2009, il a franchis la porte du Centre Gay Lesbien Bi et Trans de Rennes (CGLBT), y devient bénévole et, touche-à-tout, y prend des responsabilités au fil des années.
En 2015, il quitte la présidence pour faciliter son engagement auprès de la Fédération LGBT Nationale dont il est actuellement porte-parole. Des actions de terrain en Bretagne au travail avec les élu·e·s, Antonin est confronté à des publics très variés dans des domaines tels que la lutte contre les discriminations, la promotion de la santé, l'accompagnement individuel ou l'éducation populaire.

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
14:25

French subtitles

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