Les hommes rêvent des femmes. Les femmes rêvent d'elles-mêmes en train d'être rêvées. Les hommes regardent les femmes Les femmes se regardent en train d'être vues. Les femmes rencontrent constamment des regards qui agissent comme des miroirs. qui leur rappellent de quoi elles ont l'air ou de quoi elles devraient avoir l'air. Derrière tout regard se trouve un jugement. Parfois le regard qu'elles rencontrent est le leur, réfléchi par un miroir. Une femme est toujours accompagnée sauf quand elle est seule. Peut-être même alors, par sa propre image d'elle-même. Quand elle traverse une pièce, ou pleure la mort de son père, elle ne peut éviter de se voir, marchant ou pleurant. depuis sa plus tendre enfance, on lui apprend et on la persuade de se surveiller en permanence. Elle doit surveiller tout ce qu'elle est et tout ce qu'elle fait car la façon dont elle apparaît aux autres et en particulier aux hommes est d'une importance cruciale, car on pense d'habitude que de cela dépend le succès de sa vie. Manières de voir Une femme dans la culture des Européens privilégiés est d'abord et surtout une vue à regarder. Quel genre de vue est révélé dans la peinture à huile européenne standard Il y avait des portraits de femmes comme des portraits d'hommes. Mais dans une catégorie de peinture, les femmes étaient le sujet principal récurrent. Cette catégorie était le nu. Dans les nus de la peinture européenne, nous pouvons trouver un des critères et des conventions par lesquels les femmes étaient jugées. Nous pouvons voir comment les femmes étaient vues. Qu'est-ce donc qu'un nu ? Dans son livre sur le nu, Kenneth Clark dit que la nudité est simplement l'absence de vêtements. Le nu, selon lui, est une forme d'art. Je le dirais autrement. Etre nu est être soi-même. Etre un nu est être vu nu par les autres et pourtant ne pas être reconnu comme soi-même. Un nu doit être vu comme un objet pour être un nu. Dans la peinture à huile européenne, la nudité n'est pas prise telle quelle comme dans l'art archaïque. La nudité est une vue pour ceux qui sont habillés. C'est pourquoi la peinture de Manet qui marque la fin de la période que j'envisage est un commentaire si profond sur toutes les oeuvres qui l'ont précédée. L'histoire début avec l'histoire d'Adam et Eve telle que la Genèse la raconte. La femme vit que l'arbre était bon à manger et séduisant à voir et que cet arbre était désirable pour acquérir le discernement Elle prit de son fruit et le mangea. Et elle en donna aussi à son mari et il en mangea. Et leurs yeux s'ouvrirent et ils surent qu'ils étaient nus. Et le seigneur Dieu appela l'homme et dit Où es-tu ? Et il dit : J'ai entendu une voix dans le jardin et j'ai eu peur parce que j'étais nu et je me suis caché. A la femme Dieu dit : Je vais multiplier les peines de tes grossesses. Dans la peine tu enfanteras des fils. et ton désir ira vers ton mari et il te dominera. Deux choses sont frappantes dans cette histoire. Ils prennent conscience de leur nudité en mangeant la pomme chacun voit l'autre différemment la nudité est créée dans l'esprit du spectateur. Le second fait frappant est que la femme est blâmée et punie en étant soumise à l'homme. Par rapport à la femme, l'homme devient l'agent de Dieu. Dans l'art médiéval, l'histoire est souvent illustrée scène après scène comme dans une bande-dessinée. Pendant la Renaissance, la séquence narrative disparaît et le seul moment qui est clairement peint est celui de la honte. Le couple porte des feuilles de figuier ou fait un geste modeste de leurs mains Mais à présent, leur honte n'est plus tant l'un envers l'autre qu'envers le spectateur. C'est le spectateur qui les regarde et les rend honteux. Plus tard, comme la peinture devient plus profane, de nombreux autres sujets offrent l'opportunité de peindre des nus. Mais dans la tradition européenne, le nu implique toujours la conscience d'être vu par le spectateur. Ils ne sont pas nus comme ils sont, ils sont nus comme vous les voyez. Souvent, comme dans le sujet fréquent de Suzanne et les vieillards, c'est même le thème du tableau. Nous nous associons aux vieillards pour l'espionner. Elle nous regarde en retour la regardant. Parfois la femme, Suzanne, se regarde dans le miroir se détaillant comme les hommes la voient. Elle se voit d'abord et avant tout comme une vue ce qui signifie comme une vue pour les hommes. Ainsi, le miroir est un symbole de la vanité des femmes. Pourtant l'hypocrisie masculine est ici évidente. Vous avez peint une femme nue car vous aimez la regarder Vous lui mettez un miroir dans la main, et vous appelez la peinture vanité condamnant ainsi moralement la femme dont vous avez peint la nudité pour votre propre plaisir. Et ainsi, incidemment, vous répétez l'exemple biblique en blâmant la femme. Le Jugement de Paris est une autre sujet mythologique fameux avec la même idée implicite de regarder des femmes nues en les jugeant. Pâris offre la pomme à la femme qu'il trouve la plus belle. La beauté dans ce contexte devient concurrentielle. Le jugement de Pâris est transformé en concours de beauté. L'esthétique, quand elle est appliquée aux femmes n'est pas aussi désintéressée que le mot beauté pourrait le suggérer. Je ne veux pas dénier la part cruciale que la vision joue dans la sexualité. Mais il y a une grande différence entre être vu nu comme soi-même et être vu par un autre de cette façon et un corps exposé. Etre nu c'est être sans déguisement. Etre exposé, c'est être amené à considérer la surface de sa propre peau, les cheveux de son propre corps comme un déguisement. Un déguisement qui ne peut pas être retiré. Parmi les dizaine de milliers de peintures à huile européennes de nus il y a peut-être 20 ou 30 exceptions des peintures où l'artiste a vu la femme révélée comme soi-même. ce Rubens ce Rembrandt ce Georges de la Tour Ces peintures sont aussi personnelles que des poèmes d'amour et leur caractère est assez reconnaissable La plupart des nus dans la peinture à huile ont été dessinées par les peintres pour le plaisir du seul propriétaire spectateur masculin qui les appréciera et les jugera comme des vues. Leur nudité est une autre forme de vêtement. Ils sont condamnés à n'être jamais nus Sans leurs vêtements, ils sont aussi parés qu'avec leurs vêtements. Celles qui ne sont pas jugées belles, ne sont pas belles. Celles qui sont jugées belles, on leur donne le prix. Le prix, c'est d'être possédée. C'est-à-dire, d'être disponible. Charles II commanda cette peinture secrète à Lely. Comme des centaine d'autres, il peut s'agir de Vénus et Cupidon. Mais en fait, c'était le portrait de l'une de ses maîtresses, Nell Gwyn. Il choisit de la montrer regardant passivement le spectateur qui la voit nue. Sa nudité n'est pas l'expression de ses propres sentiments. C'est seulement un signe de sa soumission à sa demande. La peinture, quand il la montre à d'autres, démontre cette soumission. Ses invités l'envient. Par contraste, dans une autre tradition, la nudité est une célébration de l'amour sexuel actif entre deux personnes. La femme, aussi active que l'homme Les actions de chacun absorbent l'autre. Dans la peinture à huile, la seconde personne ou la seconde personne qui compte est la personnel'étranger qui regarde la peinture. Comparez l'expression de ces deux femmes. L'une est le modèle de ce qui est considéré comme un chef-d'oeuvre d'Ingres et l'autre est un modèle mal payé par un photographe pour un magazine féminin. ou ces deux-là. Juste l'expression. Le regard. Que voyez-vous ? Il me semble que dans chaque paire, l'expression est remarquablement similaire, et c'est une expression de réponse avec un charme calculé à l'homme dont elle sait qu'il la regarde. bien qu'elle ne le connaisse pas. Il est vrai que parfois une peinture intègre un amant masculin mais l'attention de la femme est très rarement adressée à lui. Elle regarde ailleurs ou elle regarde hors de la peinture, vers celui qui se considère comme son véritable amant le spectateur-propriétaire Cette peinture fut envoyée en cadeau par le Grand Duc de Florence au Roi de France. Le garcon agenouillé sur le coussin et qui fait un baiser est Cupidon Elle est Vénus Mais la façon dont son corps est arrangé n'a rien à voir avec ce baiser. Son corps est disposé de cette façon pour être exposé à l'homme qui regarde le tableau. Le tableau est fait pour attiser sa sexualité. Il n'a rien à faire avec sa sexualité à elle. La convention de ne pas peindre les cheveux du corps féminin contribue à la même finalité. La chevelure est associée au pouvoir sexuel, à la passion. La passion sexuelle féminine a besoin d'être minimisée de telle sorte que le spectateur sente qu'il a le monopole d'une telle passion. Il y a des peintures qui montrent des amants masculins. Elles existent bel et bien. Mais elles sont pour la plupart des peintures privées, semi porno-graphiques. Dans la plupart des peintures, qui étaient peintes pour être vues, plutôt que pour être cachées, le seul rival du spectateur masculin est un Cupidon. Comme il est extraordinaire que le symbole de la passion soit un petit garçon. Pour une raison semblable, les femmes dans l'art européen de la peinture à huile sont rarement montrées en train de danser. Elles doivent être montrées langoureuses exhibant un minimum d'énergie. Elles sont là pour nourrir un appétit, non pour en avoir un elles-mêmes. L'appétit était théoriquement gargantuesque L'absurdité de cette flatterie masculine, bien qu'elle n'ait pas été perçue absurde à cette époque, atteint son sommet dans l'art académique publique du XIXe s. Des premiers ministres discutaient sous des peintures comme celle-ci. Quand l'un d'eux se sentait perdre la partie il levait les yeux pour une consolation. Le nu dans la peinture à huile européenne est habituellement présenté comme un sujet idéal. On dit que c'est une expression d'un esprit humaniste européen. Je ne veux pas dénier entièrement la vérité de cela mais j'ai essayé d'y apporter un complément, en commençant à partir d'un point de vue différent. Dürer, qui croyait dans le nu idéal pensait que cet idéal pouvait être construit en prenant les épaules d'un corps, les mains d'un autre, les seins d'un autre encore, et ainsi de suite. Etait-ce cela l'idéalisme humaniste ? ou était-ce le résultat de l'indifférence envers qui était vraiment une personne ? Ces peintures célèbrent-elles, comme on nous l'enseigne normalement, les femmes qui y sont représentées ? ou le voyeur masculin ? Y a-t-il une sexualité dans le cadre ? ou devant lui ? J'ai montré l'émission, comme vous l'avez vue jusqu'à maintenant, à cinq femmes. Cela commençait à devenir absurde que les seules images que vous voyiez soient des images de femmes silencieuses, muettes. Donc je les leur ai montrées et leur ai demandé de les commenter. De commenter non pas tant l'émission mais plutôt les questions qu'elle soulève. Surtout, la question de comment les hommes voient les femmes ou comment ils les ont vues dans le passé. et comment cela influence la façon dont les femmes se voient elles-mêmes aujourd'hui. Nous avons une image, bien sûr, nous avons toutes une image de nous-mêmes et c'est une image visuelle, mais je me demande comment ce genre de peinture classique européenne a façonné cette image. Et dans mon cas, je trouve presque impossible quand je regarde les peintures que vous montrez, dans votre film, je ne peux pas les prendre au sérieux, je ne peux pas m'identifier à elles parce qu'elles sont tellementt exagérées Toujours, vous savez, elles s'attachent à une caractéristique sexuelle secondaire, ces poitrines énormes, ces fesses bestiales, ces choses énormes comme ça, et elles ne sont pas, simplement, réelles. Alors qu'avec des photographies, vous pouvez sentir cela comme potentiel, possible, bien que cela ne le soit probablement pas. Mais ces peintures que vous montrez sont ce qu'on appelle idéalisées. Et donc, elles sont pour moi très irréelles. en relation avec quelque profonde image que ce soit que je puisse avoir de moi-même. et en relation à n"importe quel plaisir profond que je puisse avoir en regardant un autre corps féminin ils ne me donnent pas ce plaisir du tout. Je peux les admirer comme peintures, mais ils ne signifient pas des êtres humains pour moi L'image à laquelle je me compare est la photographie parce que c'est avec des photographies que j'ai été encouragée à penser à moi-même de cette façon c'est essentiellement la publicité pour moi qui a contribué à cela et par conséquent, je trouve extrêmement intéressant de revenir en arrière et de penser aux nus de cette manière car je ne l'ai jamais fait, mais en voyant le film je n'ai aucun doute que la même chose s'applique. Et trouvez-vous que les nus en peinture sont irréels de la même façon ? Oui. Vous ne pouvez obtenir aucune information à partir d'eux, n'est-ce pas ? Il n'u a pas de guide de comment on pourrait - Quelle information manque-t-il ? Bien, l'activité. Le dynamisme. N'importe quoi. C'est la façon dont quelqu'un vous voit et c'est tout c'est posé sur vous.. Je suis contente que vous ayez montré les hommes en peinture car j'ai toujours trouvé extrêmement choquant les hommes sont habillés et les femmes sont nues et cela semble résumer toute la situation c'est humiliant car ces femmes sont bien humiliées et je pense que c'est une partie de toute la structure des choses comme la plupart des gens ont, à un certain moments de leur vie, des cauchemars où ils courent dans la rue complètement nus alors que tout le monde est habillé. Et cela me semble être un élément des peintures. Une chose très intéressante dans ce que vous avez dit dans le film était au sujet de la nudité comme une sorte de déguisement ce n'était pas les réelles personnes elles-mêmes et libres Mais c'était juste une autre parure qu'elles portaient et pire qu'une parure, en un sens, parce que c'était quelque chose que vous ne pouvez pas enlever. Cela vient, je pense, de la nudité combinée à une pose. et c'est inévitable si vous allez faire une peinture avec un modèle. Dans un sens, je pense que nous sommes toujours habillés. Nous nous habillons toujours pour une part Nous mettons toujours un uniforme d'un genre ou d'une autre et je pense que les femmes font cela plus que les hommes. Les hommes ne le font que depuis assez récemment. Les femmes s'habillent toujours pour montrer le genre de personnage qu'elles veulent représenter : la mère, la travailleuse, la jolie petite poupée. et la nudité est un uniforme, en un sens, pour dire je suis prête pour le plaisir sexuel. vous voyez et donc ça ne le fait pas. Vous ne pouvez pas vous identifier en étant nue à être en liberté. Je viens de lire ce livre Histoire d'O qui décrit la manière dont une femme est réduite au plaisir sexuel pour l'homme dont elle est amoureuse. pour devenir complètement un objet et ce qui m'a frappé dans tout ce livre comme la plus impressionnante image était le fait que on lui disait qu'il ne fallait jamais qu'elle se touche les seins qu'elle ferme totalement sa bouche ou serre les jambes. Et donc tout l'intérêt de son attitude est qu'elle est disponible en permanence et cette sensation d'être disponible d'attendre d'autres gens est la totale antithèse de l'action et vous savez c'est comme la publicité des bureaux de Brook Street. Tony n'a pas couru, il laisse sonner le téléphone trois minutes Et vous sentez toute cette situation, le nombre de femmes à qui vous parlez qui disent : je reste tant de nuits par semaine à attendre que quelqu'un appelle Le concept de disponibilité implique la passivité car si vous attendez simplement que quelqu'un d'autre agisse alors vous ne pouvez pas agir vous-même. Oui, c'est comme quand vous vous réveillez quand un homme vous touche, quand un homme vous embrasse, vous allez vous lever et sortir du lit mais même s'il s'agit d'une excuse pour faire quelque chose de vous-même je pense que les femmes sont trop timides elles attendent trop longtemps. Oui, oui Puis-je dire quelque chose sur le narcissisme ? Je pense qu'autant les hommes que les femmes sont narcissiques mais dans un sens différent, et je pense que de temps en temps j'ai l'impression que les hommes et les femmes sont terriblement narcissiques et sont coupés les uns des autres de leurs images d'eux-mêmes. Mais alors que l'image qu'une femme a d'elle-même dérive directement d'autres personnes, le miroir dont vous parlez, l'image qu'un homme se fait de lui-même dérive du monde qui est le monde qui lui donne en retour son image parce qu'il agit dedans. et les femmes sont attirées à lui comme une source, une activité centrale, comme une source de valeur comme il est dans le monde, le fait qu'il donne de la valeur à elle est important. Et ainsi comme leurs centres de narcissisme sont différents, et que celui de la femme est seulement essentiellement relié à autrui, elle est dans une position beaucoup plus passive que lui, en relation à cela. Oui Voyez-vous le narcissisme comme essentiellement un phénomène négatif ou positif ? Eh bien, je pense qu'il est très difficile de répondre mais dans le sens où il est relié à une identité, c'est un phénomène positif ; et il me semble que ce qu'envient les femmes chez les hommes en cela tout le temps est qu'ils ont un sens de leur identité qu'il y a quelque chose d'important en eux et pour eux autre que simplement ce que les autres pensent d'eux et je pense que cela est le produit de leur interaction dans le monde c'est autre chose chez d'autres gens et c'est presque comme si à travers cette interaction ils avaient vraiment construit un magasin de valeur de leur sens d'eux-mêmes. qui est une constante cela ne peut pas être perdu. et parce qu'une femme ne sort pas elle ne crée pas de magasin elle attend l'interaction présente avec un homme et ça peut aller, ça peut s'arrêter à tout moment Il y a quelque chose ici que j'aimerais réellement développer un petit peu, parce que le narcissisme est une façon très marquée de statuer une relation avec le monde qu'on soit un homme ou une femme n'est-ce pas mais l'autre question qui est contenue dans celle-ci, mais qui ne va pas aussi loin comme idée est l'espèce de plaisir de soi-même d'une personne que ce soit un homme ou une femme dans la vie, dans la mort; dans les relations avec un homme ou une femme et je pense que cela compte énormément et je pense que ce n'est pas seulement une chose intérieure avec laquelle vous vivez mais c'est une chose totalement extérieure par laquelle vous obtenez des relations avec votre propre milieu dans le monde que vous ne pouvez pas obtenir d'une autre façon c'est quand vous vous êtes rendu en un sens si inconscient de vous-même que vous sortez facilement, naturellement, comme compulsivement vers ce qui vous entoure maintenant, quand vous êtes un enfant vous êtes attiré vers les autres personnes plus que par autre chose, n'est-ce pas ? les montagnes, les rivières, où que vous alliez et alors seulement comme vous continuez graduellement vous faites cet espèce de contact absolument nécessaire avec les gens mais je pense vraiment que l'espèce d'essence du plaisir de soi comme une sorte de chose possible dans le monde moderne et quelque chose que moins de femmes que d'hommes ont et veulent et doivent posséder est le pouvoir ; la compulsion, pas le pouvoir la compulsion d'entrer en contact avec le monde comme vous vivez dedans et quand je dis cela je ne veux pas simplement dire les gens d'à-côté ou vos amis je veux dire que se passe-t-il ? Oui Je ne suis pas si sûre à propos du plaisir Je pense que c'est vraiment une chose à deux bords Je sais comme je suppose que je l'ai toujours su que j'ai pris conscience de cela dans ce film Je ne me suis jamais regardée dans le miroir en me voyant comme je suis J'ai toujours vu l'image que je voulais Je sais et mes enfants l'ont remarqué que si je me maquille je mets une certaine expression Si, depuis l'adolescence, je me suis vue nue dans le miroir, je n'ai pas pensé à moi-même nue, J'ai pensé à moi-même comme un nu et je pense que cela vient d'avoir été trainée dans toutes les grands musées d'art c'est la culture, c'est la beauté avec un B majuscule bien sûr, jusqu'à un certain point par la publicité aussi mais beaucoup plus par la peinture vous pensez que le corps féminin est beau je suis un bel objet, sinon, je dois faire quelque chose pour ça. et de là, la partie douloureuse d'une chose narcissique est le sentiment d'inadéquation cette occupation de toujours poser devant un miroir je pense qu'on la fait absolument automatiquement et le résultat, c'est que si vous vous attrapez vraiment dans un miroir par hasard non de façon délibérée parce que vous vous habillez ou vous allez prendre un bain mais parce qu'il y en a un dans la rue, ou vous vous voyez dans une vitrine, cela fait un choc terrible parce que vous voyez soudainement comme vous êtes c'est-à-dire échevelée, négligée, mal habillée, fatiguée, et ainsi de suite vous ne voyez pas la pose du tout et je pense que c'est ce qui arrive aux femmes elles sont toujours en train d'essayer de mesurer cette image érotique qui est projetée. Il y a certaines peintures et je pense en ce moment à une peinture où il y a une femme qui porte une parure elle n'est pas nue mais la tenue est si légère, si confortable, si facile et, selon moi, tout à fait comme ce à quoi la peinture d'une femme devrait ressembler je pense qu'elle vient d'une période avant celle que vous étudiez, elle est d'il y a longtemps elle est de Lorenzetti C'est dans le Bon et le Mauvais Gouvernement c'est une fresque, très très ancienne et c'est l'image d'une femme qui est sensée représenter la paix c'est assez extraordinaire mais elle pourrait être l'une de ces femmes libérées d'aujourd'hui ou qui essayent de l'être. Elle est à l'aise, relax, elle ne joue aucun rôle du tout elle est capable de combiner le plaisir et la pensée et le rêve et elle pourrait se jeter dans l'action à tout moment et pour moi elle a beaucoup, beaucoup plus à voir avec la nudité, avec elle-même, avec la vérité d'elle-même qu'aucun des autres nus que j'ai vus.