Bonjour, je m'appelle Nacho Ramos. Je suis né en 1986 à Vilafranca del Penedès, un village près de Barcelone, fils d'émigrants andalous. Je suis né avec l'arthrogrypose et je suis actuellement invalide à 88 %. Depuis l'enfance, j'ai subi de multiples opérations, de la rééducation, bref, ce qui était nécessaire pour améliorer ma mobilité et rectifier les malformations avec lesquelles je suis né. J'ai eu une enfance relativement bonne et de bons copains au collège ; j'ai toujours voulu faire la même chose que mes copains, comme pouvoir jouer au football ou mener une vie normale. En 2009, mes parents se sont séparés et je suis allé vivre dans le village de ma mère, Valenzuela, dans la province de Cordoue. Nous avons commencé une nouvelle vie. Je suis resté un an sans rien faire, jusqu'au jour où en discutant avec l'assistante sociale, je découvre l'unité de jour de la FEPAMIC. Je commence à faire les 75 km pour aller du village à FEPAMIC, pour assister à son unité de jour, faire de la rééducation, des activités sportives et de l'ergothérapie, et j'ai commencé à travailler avec Ramón, moniteur d'activités sportives (à gauche), il avait été boxeur et utilisait beaucoup la boxe avec les garçons de l'unité, pour retrouver de la coordination et de l'équilibre. On s'est mis à travailler. J'ai aussi commencé à travailler avec mon kiné, Alberto et avec Núria, mon ergothérapeute. À force de faire de l'exercice, on pouvait déjà voir des changements. J'ai perdu du poids, chaque jour je bougeais et me sentais mieux, et comme j'aimais la boxe, j'ai décidé faire de la compétition, mais où faire de la boxe pour handicapés ? Je n'avais jamais rien vu de tel. Un jour ils m'ont apporté un sac de boxe, on l'a accroché sur un espalier, (photo) on m'a filmé et j'ai décidé de la publier sur Facebook. Je la publie sur Facebook et la page d'une promotrice de boxe me demande la permission de la partager. J'ai accepté, bien sûr, et lui ai dit de la partager pour qu'elle soit vue. Elle le fait et un journaliste du MARCA, Nacho Labarga, la voit. Il me dit : « J'aimerais raconter ton histoire dans une interview. » et grâce à cela, Leandro Iglesias, de la chaîne laSexta me contacte. Leandro me rencontre, m'interviewe, et j'hallucine complètement ! Mais mon problème est resté le même, je ne pouvais pas faire de compétition ! Mais grâce à cela, j'ai fait mes débuts à la radio, dans le programme « Segundos fuera », je gérais la section « Boxeo sin límites » interviewant des gens et plus encore. Un jour, je remarque qu'en France la boxe pour personnes handicapées existe, opposant des garçons en fauteuil roulant, comme des garçons atteints de trisomie 21. Pour moi ce fut absolument incroyable, j'ai dit : « Maintenant c'est bon ! » Après tous les efforts que j'ai investis à m'entraîner, je veux concourir aussi. Je suis aussi entêté parce que quand j'étais petit, je voulais être torero. Alors j'ai cherché comment y aller, et un financement privé, jusqu'à ce que je trouve le moyen d'aller en France. Mais avant d'y aller, on m'a interviewé pour El Larguero, de la chaîne SER. Je me suis dit : « La vache, El Larguero ! » Ensuite, on m'a appelé pour réaliser un petit documentaire sur mon premier voyage en France, et pour expliquer pourquoi je veux faire de la compétition, et moi j'hallucinais, je la racontais à tout ceux à qui j'étais présenté. Et ensuite, on a commencé à s'entraîner avec une personne importante, Gregorio Perea, dit « Aspirina », boxeur professionnel à la retraite, actuellement entraîneur, et 8 fois champion amateur d'Espagne. On s'est entraîné avec lui et, en même temps, à la FEPAMIC. Une boxe un peu plus professionnelle, avec des camarades, une classe de boxe plus difficile, et un entraînement plus complet. Là c'est la couverture du documentaire. Ils m'ont dit qu'ils viendraient avec moi en France. Deux caméramans sont venus avec moi et on m'a donné une caméra pour que je m'enregistre. Et ainsi on a commencé à filmer. Cette année, le documentaire est depuis peu disponible, on avait commencé à filmer en 2013. J'ai décide d'aller en France mais je n'ai pas de moyens, c'est compliqué, je n'ai pas de sponsor, l'économie étant ce qu'elle est. Au final, avec l'argent que j'ai obtenu nous devions voyager en car. (Rires de Nacho) On est allé en camionnette à Madrid, de là on a pris le car, et on a débarqué en France. Mon rêve de compétition était déjà là-bas. Je fus le premier handicapé espagnol à concourir dans un championnat officiel. Ça c'était le rêve. Cette année là, ils m'ont tous battu et je suis arrivé en 4ème place, mais bon, ce n'est pas grave. On est rentré de France. Je suis passé de ne pas pouvoir concourir, à être le premier d'Espagne à le faire. Je suis arrivé en 4ème place mais on m'a donné le prix du boxeur le plus courageux du championnat, toutes catégories comprises. On m'a dit qu'avoir ce premier prix c'était mieux que d'avoir gagné, parce qu'il n'y en a qu'un par catégorie; fauteuil roulant, trisomie 21, etc. Du coup, j'étais très content. J'ai continué à m'entraîner, et grâce à la FEPAMIC, j'ai eu l'occasion d'intervenir dans des écoles pour expliquer mon cas, lors de la Journée internationale de l'handicap, pour leur montrer qu'on peut réussir. J'ai continué à m'entraîner avec Aspirina, les lundis, mercredis et vendredis. J'y allais une fois par semaine, je voulais m'entraîner pour être champion. J'avais concouru et désormais mon rêve c'était d'être champion. Alors j'ai commencé à m'entraîner avec Aspirina. Les mardis et jeudis à la FEPAMIC avec Ramón, Núria y Alberto. On a commencé à organiser des présentations de boxe le soir, où beaucoup de gens venait me voir. Incroyable ! J'ai été à Séville où j'ai reçu le titre de Champion d'honneur d'Andalousie. Kiko Martínez, ancien champion du monde, était présent. M'imaginer qu'un champion du monde me remettrait un trophée... incroyable ! Dans mon village, est organisée une course qui monte jusqu'à la colline Boyero, elle a jusqu'à 18 % de dénivelé. Je m'y suis inscrit. On m'a dit : « Mais tu vas arriver en dernier ! » J'ai répondu : « Le dernier sera toi, parce que tu ne vas pas la courir. » J'ai réussi à terminer la course. La première année, j'ai terminé dans les milles et fait un temps correct. Ce fut une belle expérience et une fois encore, j'ai constaté que si on veut on peut, que vouloir c'est pouvoir. La date du départ en France arriva, cette année, c'était à Bourges, l'année d'avant, c'était à Périgueux. Cette année, on m'a donné anonymement 1000 euros et j'ai vendu des tee-shirts, on a récolté assez pour partir en avion. Les choses s'améliorent ! Faire 12 heures de bus puis combattre le lendemain... c'est compliqué. Nous sommes arrivés, j'ai combattu, et que s'est-il passé ? Deuxième ! 2è place, j'avais gravi une autre marche, et l'entraînement d'Aspi paya ses fruits. Après tout mes efforts, je reviens second alors que j'y étais presque. J'avais gravi une marche supplémentaire, il ne me restait plus qu'à être premier. On est rentré et le prix des jeunes talents de Cordoue m'a appelé. On me dit que je suis nominé pour le Prix du jeune sportif 2014. Le club de foot de Cordoue venait de s'imposer en première division. Je leur dit : « Vraiment ? Moi ? Ils m'ont nominé ? » « Et toi, t'es qui ? Tu serais pas un de mes amis ? C'est une blague ? » Mais non, c'était bien vrai, j'y suis allé et on m'a remis le prix. Ce fut une très belle expérience. Ma soeur Marbella et mes neveux sont venus. C'était incroyable ! Petit à petit, je vois les résultats [de mes efforts et de mon travail]. Ma seconde course de la colline Boyero, cette année, il y a 4 km de plus que l'année d'avant. Cette fois, je suis super content du résultat. Je me suis acharné pour arriver en haut des 4 km en 38 minutes, j'étais très fier, je me sentais très bien parce qu'avant je pesais 82 kgs et maintenant 54,5. Je me sens vraiment mieux et j'ai complètement changé de vie. Je ne pouvais rien faire et je travaille maintenant dans le sport, vous imaginez ? On a continué à travailler avec Aspi, de plus en plus dur. Les sessions du dimanche matin à courir dans les champs, faire des séries, gravir des côtes pour muscler les jambes, des déplacements, des esquives. C'était du travail. Rentrer chez soi se reposer et ne pas sortir le soir avec ses amis. Jusqu'à même éteindre le portable pour ne pas recevoir de messages. Et la 3ème fois que nous allons en France, il y a plus d'opposants que jamais, 4. Super difficile ! Pour gagner dans un pays étranger, il faut établir des points très clairs. Des 4 combats, j'ai remporté 4 victoires. En terminant le dernier combat, j'ai enlevé mes gants, mon entraîneur dit : « Ce que t'as envoyé ! » et moi : « Je te l'avais dit ! » Je lui ai dit : « On va aller boire une bière pour célébrer. » Et bien, imaginez, la 3ème année de compétition, champion ! J'ai commencé par être 4ème, puis 2ème, et enfin 1er. Et ça me laisse penser qu'en travaillant on y arrive, mais il faut travailler dur. Les choses ne viennent pas d'elles-mêmes, si tu veux quelque chose, vas le chercher, et travailles dur pour l'avoir. Celui qui me dit qu'il ne court pas à cause de ça ou ça, ce ne sont que des excuses. Tout ce qu'on se dit sans avoir essayé, ce ne sont que des excuses. Et ça c'est mon histoire. Je suis super content. Maintenant, je veux faire un triathlon, je veux voir ce que je peux faire. Je veux remettre mon titre en jeu cette année en France. Je cherche le moyen de faire venir un français pour combattre, ici à Grenade, en Espagne. Et on continue à travailler dur pour développer ce sport en Espagne, et pour qu'on nous laisse concourir. Merci beaucoup. (Applaudissements)