Vous voilà, coincé sur une île déserte avec un autre naufragé, à jouer la dernière banane aux dés. Vous vous êtes mis d’accord sur ces règles : vous lancerez deux dés, et si le plus grand chiffre est un, deux, trois ou quatre, le joueur un l’emporte. Si le plus grand chiffre est cinq ou six, c’est le joueur deux qui gagne. Essayons à nouveau deux fois. Ici, c’est le joueur un qui gagne, et là, le joueur deux. Alors, lequel voulez-vous être ? À première vue, il semblerait que le joueur un soit avantagé, elle gagnera si n’importe lequel des quatre chiffres est le plus élevé, mais en réalité, le joueur deux a environ 56% de chances de gagner chaque partie. On peut le visualiser en faisant la liste de toutes les combinaisons possibles obtenues en lançant deux dés, puis de compter celles que remporte chaque joueur. Voici les possibilités pour le dé jaune. Et les possibilités pour le dé bleu. Chaque case du tableau correspond à une combinaison possible lorsqu’on lance les deux dés. En obtenant un quatre puis un cinq, on y inscrit que la victoire est pour le joueur deux. Avec trois et un, c’est une victoire pour le joueur un. Il y a en tout 36 combinaisons possibles, et chacune a exactement les mêmes chances de se produire. C'est ce que les mathématiciens appellent les événements équiprobables. On comprend alors pourquoi la première impression était fausse. Bien que le joueur un ait quatre chiffres gagnants, et l'autre joueur deux seulement, les chances pour que chaque chiffre soit le plus élevé ne sont pas les mêmes. Il n'y a qu'une chance sur 36 que le un soit le plus grand chiffre. Mais il y a 11 chances sur 36 que le six soit le plus élevé. Ainsi, si n’importe laquelle de ces combinaisons sort, c’est le joueur un qui gagne. Et si c’est l’une de ces combinaisons, le joueur deux l’emporte. Parmi les 36 combinaisons possibles, 16 donnent la victoire au joueur un, et 20 au joueur deux. On peut y réfléchir différemment. La seule manière de gagner pour le joueur un est que les deux dés fassent un, deux, trois ou quatre. Si un cinq ou un six sort, le joueur deux l'emporte. La probabilité qu’un dé tombe sur un, deux, trois ou quatre est de quatre sur six. Le résultat de chaque lancer est indépendant de l’autre. Or on peut calculer la probabilité commune d’événements indépendants en multipliant leurs probabilités. Ainsi, les chances d’obtenir un, deux, trois ou quatre sur les deux dés sont de 4 sur 6 fois 4 sur 6, soit 16 sur 36. Puisqu’il faut un gagnant, les chances que ça soit le joueur deux sont de 36 sur 36 moins 16 sur 36, ou 20 sur 36. Ce sont exactement les mêmes probabilités que celles obtenues grâce au tableau. Pourtant, cela ne signifie pas que le joueur deux va gagner. ni même que si vous lanciez 36 fois les dés en étant le joueur deux, vous remporteriez 20 parties. C’est bien pour cela que dans des situations comme le lancer de dés, on parle de hasard. Malgré la possibilité de calculer une probabilité théorique pour chaque résultat, on n'obtiendra pas les résultats attendus en observant quelques parties seulement. Par contre, si l’on reproduisait ces lancers aléatoires un très, très grand nombre de fois, la fréquence de victoire pour le joueur deux, se rapprocherait de sa probabilité théorique, cette valeur obtenue en écrivant toutes les possibilités et en calculant celles de chaque résultat. Ainsi, si l’on s’asseyait sur cette île déserte en y jouant indéfiniment aux dés, le joueur deux finirait effectivement par gagner 56% des parties, et le joueur un, 44%. Mais d'ici là, bien entendu, la banane aura disparu depuis longtemps.